Lecture musicale dans un salon de la nouvelle de Guy de Maupassant par Michel Fau, accompagné au piano par Nathalie Steinberg.

Dans le cadre des lectures musicales dans un salon proposées par le Théâtre National de l'Odéon; Michel Fau a porté son choix sur une nouvelle, fameuse, de Guy de Maupassant "Le Rosier de Madame Husson".

Cette nouvelle dresse, au travers de l'histoire tragique d'un jeune simplet promu rosier par la grâce d'une rombière bigote confite de vertu qui voulut importer dans sa bonne ville de Gisors la mode parisienne du couronnement des rosières, un tableau réaliste, à la fois cocasse et grinçant de la vie de province et de ses petits notables.

Comme toujours, la surprise et l'inattendu sont toujours au rendez-vous quand Michel Fau, comédien singulier et unique, monte sur scène. En l'occurrence, la narration au masculin de la nouvelle originale, est transposée au féminin. Tout de satin et de velours noir vêtu, bibi à plumes, emperruqué et maquillé, décolleté vertigineux et longs gants noirs sur peau de lait, Michel Fau endosse une robe qui évoque celle des gouailleuses des concerts parisiens de la Belle Epoque. La femme est séduisante, sûre d'elle-même et de l'effet qu'elle produit.

La soirée, scandée par la musique de Francis Poulenc avec Nathalie Steinberg au piano, débute par l'éloge des oeufs mollets, plus précisément ceux enveloppés dans un fourreau de gelée de viande aromatisée aux herbes et légèrement saisie dans la glace célébrés par Maupassant, et de la gourmandise et s'achève par un mini-récital mémorable, drolissime, donné par une diva soprano plus vraie que nature dans ses moindres soupirs et roulement d'oeil qui dispense notamment une mélodie sacrée de Jules Massenet "Souvenez-vous, Vierge Marie!"

Entre les deux, Michel Fau, comédien exceptionnel dont l'art peut tout embrasser tous les registres et toutes les disciplines, de la tragédie antique à l'opéra-bouffe, et relever tous les défis, livre le texte de Maupassant en révélant tout le sous-texte, ce qu'inclut la description apparemment anodine ou anecdotique des relatés par l'auteur, et donnant, avec une jubilation intense qui franchit le cap de la scène, une corporéité aux différents protagonistes de cette tranche de vie.

Un exercice de haute voltige et un vrai régal.