Comédie de Sacha Guitry, mise en scène de Serge Lipszyc, avec Robin Renucci, Marianne Basler, Alycia, Jean-Christophe Barc, Nathalie Krebs, Jean-Philippe Puy Martin et Marion Posta.
Le théâtre de Sacha Guitry, longtemps remisé parce que considéré comme désuet et connoté, est revenu sur le devant de la scène en 2007 à l'occasion du cinquantième anniversaire de sa mort.
Après "Faisons un rêve", "Mon père avait raison" et "Aux deux colombes", pour ne citer que les têtes de gondole, voici "Désiré", spectacle né à l'initiative de Robin Renucci qui a fait appel à son compagnon de route des Rencontres internationales de Théâtre de Haute-Corse Serge Lipszyc qui signe un spectacle, dont l'intrigue est transposée dans les années 50 si l'on en juge par les exquises robes de ces dames, ressortissant au registre "Au Théâtre ce soir" avec "des costumes de" et "des décors de" en l'occurrence respectivement de Charlie Mangel et de Emmanuel Peduzzi, dans une mise en scène sage au rythme un peu véloce.
Inutile, bien évidemment, de revenir sur l'homme d'esprit ni sur sa plume incisive trempée dans une encre à l'humour divinement caustique. "Désiré", écrit dans les années 20, est une délicieuse comédie dans laquelle se retrouvent les thématiques récurrentes de Sacha Guitry - les femmes, les domestiques et la société contemporaine - à travers une configuration triangulaire inattendue : le ministre, sa maîtresse et le majordome.
Un maître d'hôtel hors pair mais singulier puisqu'il est doublé d'un "serial Don Juan" dont le trouble obsessionnel, lié à un fantasme de soumission, ne concerne que ses maîtresses. Et il tombe amoureux de la jolie demie mondaine qui, au fait de cette pulsion, nourrit un fantasme onirique symétrique. Alors consommeront-ils ou pas ?
En domestique stylé, Robin Renucci, au jeu généreux, et Marianne Basler, qui apporte sa grâce exquise à cette femme entretenue qui ne rêve que de respectabilité qu'elle érige en héroïne presque tragique, constituent un beau duo de théâtre.
Par ailleurs, Guitry se moque gentiment du ministre barbon de la IIIème République d'origine provinciale pour qui le comble de la réussite et du parisianisme était d'entretenir une maîtresse, ici magnifiquement campé par Jean-Philippe Puy Martin, et épingle les arrivistes avec le personnage de Corniche auquel Jean-Marc Barc apporte tout le bagout et le cynisme intemporels des dirigeants de sociétés spécialisé dans les abus de biens sociaux doté d'une épouse sourde, ici l'irrésistible Nathalie Krebs au jeu impeccable.
A l'office, Alycia en cuisinière gironde et Marion Posta en femme de chambre accorte, complètent la distribution de ce spectacle grand public.