Réalisé par Karim Aïnouz. Drame historique. Sortie le 27 mars 2024. 2 heures. Avec Jude Law, Alicia Vikander, Eddy Marsan, Sam Riley, Simon Russell Beale, Erin Doherty.
Les spécialistes des quiz connaissent par coeur la litanie des épouses du roi Henri VIII d'Angleterre. Les cinéphiles, eux, ont vu moult biopics et séries concernant le sort tragique des épouses du roi, de Jane Seymour à Ann Boleyn en passant par Catherine Howard. Grâce à Karim Aïnouz, on va désormais en savoir plus - même s'il y a des choses romancées dans "Le Jeu de la reine"- sur la dernière d'entre elles, Catherine Parr.
Historiquement, est la sixième des femmes du Barbe-Bleue britannique. Celle qui s'occupa des enfants des mariages précédents du roi Henri, parmi lesquels les futures Mary et Elizabeth Tudor.
Tiré du roman d'Elizabeth Fremantle , Le "Jeu de la reine" appartient à un genre très en vogue dans le cinéma anglais depuis toujours qui raconte toute cette période d'intrigues traversant les règnes des Tudor et des Stuart
Ces films ont souvent la réputation (injuste) d'être des monuments d'académisme alors qu'ils fédèrent à chaque rediffusion un large public, avide de ces récits riches en péripéties et rebondissements historiques. Le trône anglais vacille et bien des prétendants se font couper la tête après un petit passage à la Tour de Londres.
C'est aussi l'occasion de voir des stars, comme dans "Deux sieurs pour un roi" (2008) de Justin Chadwick où s'affrontent, déjà face à Henry VIII, les sœurs Boleyn, jouées ici par Natalie Portman et Scarlett Johnansson.
Dans "Le Jeu de la Reine", c'est au tour de Jude Law de s'emparer du personnage d'Henri VIII. Une fois de plus, il est formidable, d'autant plus qu'ici, il incarne le roi à la fin de sa vie. Historiquement, il n'y a pas vraiment de tensions entre les époux, mais la loi du genre impose qu'il y en ait, et que les derniers moments du roi soient aussi chaotiques que les premiers temps.
Entre parenthèses, la star britannique, pour être crédible dans le rôle, a dû utiliser des "coussins" pour prendre s silhouette bien rebondie. Dans une scène où il est supposé besogner sa royale épouse, on aperçoit son derrière. Un énorme séant nu, qui laisse à penser que Jude Law est doublé des fesses...
Avec son précédent film de fiction, Karim Aïnouz , réalisateur libano-brésilien avait réussi, en 2019, un mélo de grande classe, "La vie invisible d'Euridice Gusmao". En s'emparant d'un film historique à l'anglaise, il ajoute une réussite de plus à sa filmographie de surdoué.
Il y parvient forcément grâce à une directrice de la photo hors pair, Hélène Louvart, qui œuvrait déjà sur "La Vie invisible d'Euridice Gusmao". En moins de dix ans, cette Française, qui curieusement a peu travaillé sur des productions hexagonales, est devenue une des plus grands opératrices du cinéma mondial. Regarder béatement "Le jeu de la reine" pour cette photo d'une grande subtilité, suffira au bonheur des cinéphiles les plus esthètes.
Pour tous les autres, cette promenade dépaysante dans un monde presque shakespearien vaut largement deux heures dans l'obscurité cinématographique.