Avec "Sorcières - Mythes et Réalités", le Musée de la Poste propose une exposition inattendue sur le thème de la sorcellerie.
Celle-ci propose une approche à la fois historique, sociologique, ethnographique et artistique de croyances liées à l'existence de forces obscures et paranormales, quel que soit leur nom à commencer par celui de Belzébuth.
Patrick Marchand, docteur en histoire et responsable des expositions temporaires du Musée de la Poste, qui assure le commissariat de cette exposition, a donc procédé à une synthèse émérite pour concocter une monstration en forme de voyage au pays du maléfice afin de cerner le phénomène sociétal de la sorcière et ce, à destination de tous les publics.
Sorcellerie, de l'imaginaire aux pratiques
La sorcière est la première personne terrifiante que l'homme rencontre dans son enfance comme figure quasiment incontournable des contes lus à l'heure du marchand de sable avec son symétrique bénéfique, la fée.
Cette déclinaison janusienne de la femme, qui correspond également à une vision manichéenne du monde, n'existe que beaucoup plus rarement pour l'homme qui, magicien, enchanteur ou alchimiste, représente la noble figure d'un savoir magique,
L'exposition commence, avec des oeuvres picturales du 17ème au 20ème siècle et des affiches de films, par la représentation de la sorcière dans lesquelles l'imaginaire côtoie le réalisme.
La sélection présentée permet notamment de suivre l'évolution historique depuis la sorcière stigmatisée notamment par l'Eglise, comme figure diabolique incarnée dans un corps de femme dont elle prend possession.
A la fin du 19ème siècle rationaliste et scientiste, avec l'émergence des sciences comme la psychiatrie et la psychanalyse, les manifestations de possession seront diagnostiquées comme symptômes de folie puis d'un état psychopathologique, l'hystérie.
Pour le cinéma, si la sorcière, dans une acception plus "féérique", est personnage de comédie, c'est plus souvent sa face noire qui inspire les films fantastiques, notamment le cinéma expressionniste allemand.
De nombreux films retracent également les affaires et procès célèbres intervenus pendant l'Inquisition ou de manière plus localisée dans des sociétés confinées.
Sur ce point, un espace est spécialement dédié à la série de tableaux peints en 1938 par José de La Pena, ordonnés autour d'un pentacle spectaculaire, qui retrace les procès qui se sont déroulés au début du 17ème siècle dans le pays du Labourd au Pays Basque.
L'exposition rassemble, de manière thématique, un nombre importants de documents et objets qui permettent de prendre la mesure, au fil des siècles, des croyances populaires immémoriales qui ont la vie dure.
Là encore, le sexe de l'intervenant est déterminant. Ainsi les personnes dotées de pouvoirs hors du commun et/ou exerçant des pratiques "paranormales" sont des hommes quand il s'agit de médecine empirique (rebouteurs, magnétiseurs, guérisseurs, radiesthésistes, exorciseurs) et des femmes quand il s'agit de convoquer l'esprit du mal (sorcières, envouteuses, empoisonneuses).
La pratique de la sorcellerie ne s'improvise pas mais consiste en l'application de recettes secrètes contenus dans des grimoires.
Si la pratique la plus connue et universelle est l'envoutement par la figurine piquée de clous ou d'épingles, les sorcières disposent d'un véritable arsenal maléfique qui utilise toutes les ressources de la nature, du monde animal mais également de la flore et du minéral pour concocter philtres et bouillons mortels.
Le malin en est le maître d'oeuvre et l'exposition présente une étonnante collection de figures et figurines du diable réalisées en bois et en terre cuite par des artisans locaux et retrouvés, au milieu du 20ème siècle, dans la demeure d'une sorcière professionnelle creusoise.
En riposte, se sont développés des pratiques préventives pour se protéger du mauvais oeil tant pour les biens (de la maison avec un joug de boeuf au dessus de la porte et des ustensiles marqués d'une croix) que pour les personnes notamment en se plaçant sous la protection de Dieu et des saints avec maints talismans, scapulaires reliquaires portatifs, chapelets, amulettes et médailles.
Quand le mal est déclaré, outre le désenvoûtement et l'exorcisme, une pharmacopée à base de plantes et de substances animales et minérales permet la confection d'antidotes.
A noter que le parcours de l'exposition est scandé par des étapes ludiques destinées au jeune public et que pour les plus grands, est disponible un catalogue didactique et très documenté élaboré par Patrick Marchand. |