Serviette et baskets étaient presque indispensables... Pas de footing en perspective, mais bel et bien un concert : celui d'Émir Kusturica and The No Smoking Orchestra. À en croire les vidéos de live qui foisonnent sur la toile, le moins qu'on puisse dire, c'est que ce rock des Balkans fait vibrer les foules. Et bien souvent, deux bonnes raisons les conduisent à savourer un tel concert : d'abord pour le plaisir de se plonger dans les films de cet incontournable réalisateur, mais aussi et avant tout pour s'amuser.
Dans la salle de l'Aéronef de Lille, c'est peu ou prou ce qui s'est passé. Les fanas de cinéma s'étaient perchés sur la mezzanine pour être sûrs d'avoir un plan large de la séquence. Émir Kusturica s'élançait sous les projecteurs avec sa bande de huit musiciens. Ce qui n'était pas sans rappeler la parodie de feus les Guignols de l'info. On y voyait le réalisateur, alors président du jury du festival de Cannes, suivi de ses acolytes, jouant très fort une ritournelle entêtante qui couvraient toutes les discussions.
Ils avaient remis ça. Violon, trompette, accordéon, pour les sonorités de l'Est accompagnés de guitares, batterie et claviers pour le côté électrique : toute la panoplie d'instruments était réunie pour jouer de nouveau très fort, ce rock endiablé dont ils ont le secret. Et ça a démarré sans modération par Jaguar. Bien que frétillant, Émir Kusturica s'économisait en commentaires. Mais il suffisait d'un bref : "Et maintenant, on va vous jouer une chanson du film "La vie est un miracle"" pour que les centaines de mains se lèvent et approuvent le choix.
La salle affichait complet. Mais tout de même, pas de déchaînement. Le public de Lille – comme à son habitude : à mettre en débat – était plutôt attentif. Pour les neuf musiciens, aucun problème, assurément là pour s'amuser à en voir le plaisir qu'ils prenaient sur scène. Ils auront tout de même tirer quelques ficelles pour emporter la foule : inviter une dizaine de jeunes filles à danser. "My dancing Club" s'exclame leur chef d'orchestre Émir Kusturica ravi de les mener à la baguette. Puis descendre jouer dans le public...
Il fallait se laisser aller, ce que nous avons fait, les Froggy's Delight. Derrière, la place que nous laissaient les curieux agglutinés sur la mezzanine, nous avons dansé, emportés par la musique, trempés, chantant "I'm not Romeo, maybe you're Juliette, but I'm not Romeo". Là, toutes les conditions étaient réunies pour vivre un très bon concert.
En première partie, un duo dont le nom fait bégayer : les Ukuleleboboys. Sur scène, Romain et Alex, deux lillois faussement mexicains malgré leur vraie moustache chauffaient le public... avec un grain de folie. Ces deux musiciens et mélomanes prennent un malin plaisir à reprendre des "tubes" au ukulélé.
L'instrument ne fait pas toujours l’unanimité. Mais là, ces Santana – petite exagération – du ukulélé changeaient la donne. Le long du set, les Ukuleleboboys ont fait déferlé un florilège de morceaux qui en plus d'être finement repris permettaient de jouer au Blind Test. Entre autres, on y reconnaissait à la sauce rock-mexicain – car ils roulent parfois les "r" – "I feel Love" de Donna Summer, "Come out and play" de The Offspring, "Earth, Wind & Fire" de Fantasy ou encore "Hit me baby One More Time" de Birtney Spears. Un mélange étrange qui a le mérite de faire sourire et à coup sûr de se déhancher.
Dès l'ouverture, avec leur déguisement et entourés de Cactus en plastique, les deux musiciens annonçaient la couleur. Ukuleleboboys est un groupe qui joue avant tout pour faire plaisir et se faire plaisir. Mais qui a le mérite de bien lancer une soirée de concert.
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