Isabelle Yafil nous emmène du côté de la rue Drouot, plus précisément au 9, rue Drouot dans son dernier roman publié aux éditions Albin Michel. Ancienne journaliste, éditrice et romancière, elle publie son deuxième roman qui a pour toile de fond le milieu de l’art et des enchères, nous ouvrant les portes d’un lieu à part et nous dévoilant le monde très confidentiel de Drouot et les dessous des expertises.

Le livre nous raconte l’histoire d’un marchand d’art, expert en œuvre d’art, Bernstein, vivant seul au milieu de nombreux chefs-d’œuvres, depuis que sa femme Judith est partie de son domicile. Ayant besoin d’une assistante, il engage Silvia, ancienne secrétaire, complètement novice dans ce milieu de l’art et des enchères. Au début de leur collaboration, Bernstein met un point d’honneur à ne lui confier que des taches administratives, coupant court à toute conversation ayant trait à l’art.

Petit à petit, Bernstein se lasse de son milieu, de la routine des expertises et des ventes aux enchères, des propos obséquieux qu’il doit tenir auprès de ses clients. Il choisit alors de ses tenir en retrait de Drouot, et il envoie Silvia suivre les enchères pour son compte. Petit à petit, Silvia se prend au jeu, elle tente de se faire une place dans un univers qu’elle ne connaît pas. Une complicité naît petit à petit entre eux malgré de nombreuses choses les opposant. Petit à petit, l’intérêt pour Drouot de Silvia se déplace vers les cafés autour de la salle des ventes où se retrouvent marchands et acheteurs d’œuvres d’art. Elle veut se faire une place dans le milieu alors qu’elle n’a aucune connaissance d’histoire de l’art. Parfois trop bavarde, au détour d’un verre, elle commet des impairs qui déplaisent à Bernstein. Jusqu’au jour où une œuvre de la collection personnelle de Bernstein disparaît, se retrouvant mystérieusement sur le marché. Fou de rage, Bernstein décide de mettre Silvia à l’épreuve…

L’histoire est construite autour du récit de Silvia, entrecoupé du point de vue de Bernstein, qui revient régulièrement et dans lequel Isabelle Yafil s’engage dans un exercice de style littéraire bien particulier, déroutant au départ, qui est celui d’écrire de nombreuses pages en une phrase unique.

Avec ce livre, Isabelle Yafil nous plonge dans un milieu que seuls les initiés connaissent dans un endroit connu de nom, l’Hôtel Drouot, salle de ventes aux enchères mondialement connue de Paris situé au 9, rue Drouot. On y découvre avec plaisir, autour de l’écriture raffinée de l’auteur, un univers très codifié : signalétique des œuvres, provenance, format, authentification, expertise, estimation, comparaison entre les autres œuvres. On y découvre un monde où on empile les tableaux de prix, où on les promène d’un appartement à l’autre ficelés dans des couvertures, où les œuvres d’art sont d’abord des souvenirs enfermés et cloitrés, témoins d’une époque révolue.

Isabelle Yafil nous offre donc avec son dernier livre un très beau moment de littérature autour de la relation de deux êtres, qui évolue au fil des pages, et qui se lit (trop) rapidement.