"You need a man with a sensitivity, a man like me"
Les questions sociales, sexuelles et politiques, ses combats pour les droits, les blessures de la vie (il faut réécouter Bitter et Weather pour mesurer le romantisme noire et intense, l’âpreté d’une rupture amoureuse), les questions d'identité occupent une place importante dans la discographie de Meshell Ndegeocello.
Ces questions d’identité sont même absolument centrales dans son nouveau disque, Ventriloquism, regroupant 11 reprises (Sade, George Clinton, TLC, Prince, Tina Turner…). Une sélection incarnant sa diversité d’influences esthétiques (rock, jazz, funk, hip-hop...), son envie de ne s'enfermer dans aucune case, aucun genre, son désir de se réfugier dans la création pour échapper au monde qui l’entoure et ses prises de positions éthiques. Ce n'est pas un hasard si les auteurs qu'elle privilégie ici sont des artistes de couleur, et que nombre d'entre eux sont des femmes.
Comment l’identité d’une musicienne, ses désirs, ses idées peuvent-ils transparaître dans la musique d’un-e autre ? Jusqu’à quel point la réappropriation dévoile-t-elle le vrai visage d’une musicienne ? N’est-ce pas ce que souhaite exprimer la photo au verso du disque, avec ce visage impressionniste ? Ndegeocello réimagine, reconstruit parfois presque totalement ces chansons en vogue dans les années 1980 et début des années 90 et qui ont résonné en elle émotionnellement pour les faire finalement siennes, sans pour autant perdre une once de leur essence originelle.
La personnalité musicale de Ndegeocello est si forte et si originale qu'elle est capable d’amener ses morceaux dans son propre monde musical. Elle y parvient grâce à un certain dépouillement de leurs instrumentations en les remplaçant par des arrangements plus organiques (guitares atmosphériques, folk ou jazzy, moins de sons connotés...) en clair-obscur, choisissant souvent d’abaisser les tempi, modifiant les lignes harmoniques mais respectant les textes à la lettre.
C’est assez flagrant sur des titres comme "Tender Love" de The Force M.D.’s et "Private Dancer" de Tina Turner devenant presque folk-funk, "Smooth Operator" de Sade avec sa rythmique motorique et sa basse lugubre, "I Wonder If I Take You Home" de Lisa Lisa and Cult Jam où les synthés sont remplacés par une guitare funk à la James Brown ou "Funny How Time Flies (When You’re having Fun)" de Janet Jackson réduit à l’os. Et que dire des versions de "Waterfalls" de TLC et "Sometimes it snows in april" de Prince qui laissent par leur force simplement sans voix.
Un disque intense. Elle est, et sera toujours, irrémédiablement libre comme un oiseau...
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