Fermez les rideaux, isolez vous. Ouvrez les yeux, détendez vous. Ici c'est bordel et désordre à tous les étages. On s'était, pour le dire vulgairement, pris The Campfire Headphase de Boards of Canada en pleine gueule voila quelques mois, et il semblerait bien qu'on soit encore une fois obligé de tendre la joue avec la sortie de ce premier album de Depth Affect.
La même secousse dans les limbes cérébrales, les mêmes tressautements, et pourtant, un beat différent, plus nerveux. Un vrai disque original, puisant autant du coté de Prefuse 73 que dans l'électronica.
Depth Affect porte bien son nom, une fois n'est pas coutume, et le duo créateur a de la ressource. Arche Lymb n'est même pas électro, rock, dub, R&B ou pop ; il est tout et rien, genèse de plusieurs styles ayant copulé sur la table de mixage. Au final mastering, que reste-t-il de ces coïts ?
Un premier titre, "One Day or so with Cyne", avec ses transitions rap/scratch/melodica, qui fait l'effet d'une douche froide, et renvoie dos à dos les duos écoutés – ou subis – jusqu'à présent.
Et puis lentement s'immisce la séquence mémorable de "One Micron bar head", trip barré sous acides aux influences allemandes évidentes. De grands voyages intemporels, le long de plages rouges et bleues, comme sur "Perpendicular b boy", destructuré et ré-assemblé comme un Lego à visage hybride, quelques touches de claviers et d'harmonium le long des récifs et l'auditeur perd pied sous le son des guitares discrètes.
Un album beau, vraiment, et donc forcément marginal. Qui rappelle Cluster, le plus grand groupe de Krautrock teuton, pour les novices. Cette absence d'humanité mixée avec une profonde inspiration des sentiments ("Sarah Carbone"). Ici pas de paroles, juste des bribes de mots en cut, création d'un nouveau langage et d'un univers où les scratchs passent sans aucun problème sur les enceintes.
Le bizarre et l'étrange se côtoient sans vergogne et sans honte, le temps d'une berceuse électronique ("Velvet and Carolina") et l'on se prend à rêver d'une musique nouvelle, écoutable ailleurs que sur les dancefloors.
Amen. |