Comédie de Eugène Labiche, mise en scène de Diane de Segonzac, avec Hervé Colombel, Michaêl Msihid, Alain Rignault, Eva Sedletzki et Valentin Terrer.
A une époque où l'instruction impressionnait encore le manant, quel n'est pas le désarroi du sieur Caboussat qui postule pour le renouvellement de sa fonction de président du comice agricole arpajonnais.
En effet, cet homme d'origine modeste ayant fait fortune dans le négoce du bois devenu notable, victime archétypale de la satire labichienne, craint qu'à tout moment ne soit dévoilé son incurie orthographique contenue jusqu'à présent grâce à sa fille qui corrige libelles et discours.
A partir de cette mince intrigue, Eugène Labiche commet une comédie savoureuse, intitulée tout simplement "La grammaire" qui brocarde allégrement la vanité des petits hobereaux de province qui se piquent d'ambitions politiques et les travers de la pseudo instruction dite "savante" et du scientisme.
Au premier rang, Caboussat donc, bien cerné par Alain Rignault, bonhomme timoré mais suffisamment finaud et égoïste pour tirer son épingle du jeu, avec son célèbre "Bah je vais faire un pâté!" pour camoufler ses fautes, et, aiguillonné par un vétérinaire incompétent (Michaêl Msihid), compromettre l'avenir de sa fille, Eva Sedletzki, prototype de le jeune vertueuse qui n'a pas encore pris la mesure du pouvoir qu'elle détient, pour conserver sa "correctrice" près de lui.
A ses côtés, en pendant, son ami, l'infatué Poitrinas, le bien-nommé, premier président de l'Académie d'Etampes, tout engorgé d'archéologie et d'un flair infaillible ("Ca sent le romain !"), qui entend révolutionner l'histoire de l'art antique alors qu'il déterre des débris de vaisselle pur 19ème enterrés par un domestique maladroit, fièrement campé dans sa sottise joyeuse par Hervé Colombel.
Mise en scène dans son jus par Diane de Segonzac, cette comédie rondement menée et ponctuée par les tirades pleines de bon sens du domestique interprété par le primesautier et délicieux Valentin Terrer, n'a rien perdu de son acuité.
Le public rit volontiers aux concessions électoralistes consistant à vanter les mérites du chou et du céleri - on n'est pas loin des déplacements officiels au Salon de l'Agriculture et des tournées de proximité dans les marchés - et à la vaniteuse vacuité de la pseudo-culture des élites locales entre autres.
Et pour que toutes ces inquiétudes grammairo-orthographiques ne restent pas lettres vaines, Diane de Segonzac, qui ne manque pas d'esprit, distribue au public à l'issue de la représentation un petit quizz sur l'accord du participe passé. |