"Dieu, Dieu. Motion de la terre, dévorent les gens de cet âge. Soit le plus dur châtiment tourmenté les Français, que nous n'avons pas venu pour aider". Chopin
"Le marbre blanc des marches du Besedni dum à Brno. Le manœuvrier ordinaire František Pavlík tombe, taché de sang. Il venait simplement défendre l'éducation supérieure et a été tué par de cruels meurtriers." Inscription sur la partition de la sonate n°1 de Janacek.
Le fond comme la forme intriquée. Un répertoire qui fait sens et qui renvoie à une somptueuse interprétation qui elle-même met en lumière ce répertoire. Disons-le tout de suite, le disque Révolution du pianiste David Kadouch est absolument superbe.
Comment mieux débuter ce disque qu’avec cette œuvre rare de Dussek, Les souffrances de la Reine de France composée en 1793 où le compositeur tchèque ami de la reine Marie-Antoinette, met sous forme de petites pièces entre classicisme et pré-romantisme une musique à programme portant sur les derniers instants de la reine : son emprisonnement, la séparation avec ses enfants, la sentence de mort prononcée contre elle, la guillotine ?
Il n’y a qu’un pas entre Dussek et Beethoven, cette envie de voir évoluer la facture de l’instrument et puis une autre histoire d’adieux. Les adieux de Beethoven à son ami, mécène et élève, l’archiduc Rodolphe contraint à quitter Vienne après l'attaque de Napoléon sur la ville. Cette sonate est une œuvre d’une intense difficulté technique, expressive et d’une très grande richesse d’invention.
Chez Chopin, cette expressivité ce fait fureur, dans le scherzo n°1 et dans l’étude "révolutionnaire", réaction du compositeur suite à la reconquête de Varsovie par les troupes russes pendant l’insurrection de novembre 1830. Une invasion qui transperce également le cœur de Liszt (Harmonies poétiques et religieuses III : Funérailles).
C’est la mort, dont il est le témoin, d’un ouvrier pendant une manifestation qui est au cœur de la superbe et intérieure sonate n°1 de Janacek. La mort rode également chez Debussy, impressionniste et nocturne, ces feux d’artifices sont le reflet de l’artillerie.
Winnsboro Cotton Mill Blues de Frederic Rzewski est comme un trou béant menant directement aux enfers. Les accords en déflagration modulent, se transforment. Le rythme motorique miroir du bruit des chaines, des coups des esclaves tout autant que celui des bruits des bottes mais c’est également : "la voix des femmes et des hommes, la voix des temps, la voix de la détermination".
Le jeu du pianiste est virtuose, dense, aussi fin qu’implacable, tranchant.
Un disque d’une force et d’une intensité incroyable. David Kadouch interroge le passé, la création face au tumulte et renvoie quelque part les compositeurs actuels au présent.
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