Tragi-comédie de Hanokh Levin, mise en scène de Véronique Widock, avec Henri Costa Vincent Debost Stéphane Facco Axel Petersen Christophe Pinon et Nicolas Couffin (en alternance Mateo Frey).
"Le Soldat Ventre-Creux", pièce tardive du dramaturge israélien Hanokh Levin, constitue une variation sur le thème de l'absurdité et l'horreur de la guerre dans le cadre d'un conflit offensif d'occupation et d'annexion de territoire, avec la thématique de l'identité usurpée.
Après plusieurs années de guerre, un soldat exténué, Sosie Ventre-Creux regagne son village mais, dans sa maison, symbole du pays, sa place est déjà occupée par un étranger qui, en toute impunité et avec l'assentiment de tous face à la loi du plus fort, lui a dérobé son identité.
Et c'est lui qui est n'est pas reconnu, même pas par son épouse qui reste muette, l'inféodation à l'occupant étant la seule chance de survie, et est regardé comme un étranger par son fils, symbole du futur d'espoir. Et puis un autre Sosie, le Ventre-à-terre blessé, viendra réclamer sa maison et mourir à son seuil.
Flirtant avec la partition brechtienne, cette pièce considérée comme militante compte tenu de la position qu'avait l'auteur face au conflit israélo-palestinien, comporte certes une dénonciation de la guerre mais également une réflexion humaniste sur ses acteurs anonymes qui sont tous, d'une certaine façon et de leur point de vue, légitimes dans leur action, et une exaltation des vertus que sont la compassion et la tolérance.
Mais la formule célèbre de André Gide à propos de la littérature est transposable au théâtre qui, lui aussi, s'accommode mal des bons sentiments, et cette pièce, qui, au plan dramaturgique ne comporte pas d'apogée dramatique, en est saturée au point de lénifier.
Cette pièce classée dans la catégorie des "comédies grinçantes" de Levin, est montée pour la première fois en France par Véronique Widock qui en privilégie une lecture lyrique et onirique qui risque de déconcerter les spectateurs habitués au burlesque virulent et corrosif qui président à la mise en scène des opus leviniens.
Dans la scénographie minimaliste de désolation conçu par Eric Mariette et des costumes loqueteux de Myriam Drosne qui renvoient à des temps anciens, les comédiens, avec en tête Stéphane Facco qui "mouille sa chemise" pour porter le rôle-titre et Henri Costa dans le rôle du Ventre-à-terre, sont tous justes et dans la tonalité imprimée par la metteuse en scène. |