On entre dans ce troisième album de The Wedding Soundtrack comme on entrerait dans la salle de répétition de Pavement à l'époque de l'éclectique Wowee Zowee.
Les deux premiers morceaux "Your hand" et "Diskofolk" sont en effet emblématiques d'une certaine maladresse qui donne un charme fou à des anti-hymnes fouillés convoquant lignes de guitare ambiance baritone, arpèges maigrelets délicieusement addictifs, des refrains qui ressemblent à des couplets et vice-versa ; un joyeux foutoir jouissif et bien foutu ("Mauss").
Les deux morceaux suivants ramènent à une atmosphère tenant plus de la complainte à la Bright Eyes des débuts ("All of a Sudden" et "Sweet for the Summer". On sent surtout une musicalité qui s'étoffe de plus en plus pour quiconque ayant suivi la carrière de ce groupe protéiforme depuis ses premiers pas en solo jusqu'aujourd'hui dans ses arrangements de cordes les plus léchés.
Les fans de Guided By Voices y trouveront aussi leur compte dans ces déflagrations mi-folk, mi électrique, à la limite du chaos, toujours sur la brèche, que ce soit dans la voix chevrotante ou dans les instruments, laissés en liberté ("Spoons").
On ne manquera pas de verser la petite larme sur des comtes tissés de fins filets de glockenspiel ("Enough") ou sur des suites d'accord tellement évidentes et heureuses qu'elles en rappellent les dernières bluettes de l'excellent Troy Von Balthazar (le sublime "Sweetness" et ses arrangements variés et subtils ou encore l'ambiance dépouillée de "Wait"). Tout dans "Night of Loveless knights" rappelle également au passage un Nick Drake torturé et obscur, passé à la moulinette de l'indie-folk moderne.
Une troisième livraison de bien belle facture pour ce groupe qui, comme un bon vin, ne cesse de se bonifier avec l'âge, comme le montre à nouveau les saisissants "Giraffe" et "A song of Despair / Hope" tout en notes et en apesanteur. On apprécie aussi, comme le titre du dernier morceau le suggère, l'humeur plus affirmée et peut-être moins pesante que par le passé, un équilibre encore mieux maitrisé entre allégresse et tristesse, entre euphorie et déviance, comme si le Xanax avait finalement bien fonctionné et que le patient s'en sortait aujourd'hui tout seul. De vrais moments de grâce parsèment ce Na Na Na Ro, dont les vocalises enfantines du titre laissent à penser qu'il reste encore de nombreux chapitres à écrire. Bonne route. |