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Yann Moix  (Editions Grasset)  juin 2018

"Dehors est la capitale de l’exil. Il y a, sur terre, ceux qui vivent chez eux et ceux qui vivent ailleurs. Parme ceux qui vivent ailleurs, il y a ceux qui vivent dedans et ceux sui vivent dehors. Le dehors dont je parle n’est pas le contraire du dedans ; il en est la négation. Ce n’est pas un dehors d’air pur et d’air frais, mais un dehors d’expulsion. Ce n’est pas un dehors de promenade, mais de persécution. Le dehors que j’évoque n’est pas un dehors d’évasion, mais un dehors d’aliénation. Ceux que j’évoque aujourd’hui, monsieur le président, sont enfermés ; ils sont enfermés dehors.

Je ne parle pas d’un dehors qui aère, mais d’un dehors qui asphyxie. Je ne parle pas d’un dehors qui libère mais d’un dehors qui aliène. Je ne parle pas d’un dehors de convalescence mais d’un dehors déréliction. Il ne s’agit pas d’un dehors de détente, mais d’un dehors de détention. Non d’un dehors qui répare mais d’un dehors qui abîme, d’un dehors qui avilit. Non pas d’un dehors de liberté, mais d’un dehors d’asservissement.

Dehors, parce que ces exilés, nous les concevons de l’extérieur, sans les comprendre, sabns nous mettre à leur place ; et pour cause : de place, ils n’en possèdent aucune. Dehors, parce que dehors est une injonction : celle, non seulement de partir, mais de ne pas rester."

C’est par ces mots que s’ouvre le dernier ouvrage de Yann Moix, Dehors, un pamphlet adressé à notre président de la république pour lui rappeler ses devoirs de chef de l’Etat vis-à-vis des exilés présents sur notre territoire. Son livre, qui sort dans la foulée de la diffusion sur ARTE d’un documentaire qu’il a lui-même réalisé en filmant la situation d’exilés présents à Calais. Re-Calais, titre de son documentaire, que je vous invite vivement aussi à regarder, nous montre en image une partie de ce que Yann Moix dénonce dans son livre.

Yann Moix est un écrivain et un homme clivant. On aime ou on n’aime pas ! Mais au-delà de ça, c’est un grand écrivain, auteur d’excellents livres. Celui-ci, dans un style particulier, le pamphlet, qu’il maîtrise parfaitement, intégrant exagération et un peu de mauvaise foi aussi confirme tout le bien que je pense de l’engagement de cet homme vis-à vis de ces personnes, les exilés, que l’on a tendance à oublier, en témoigne l’actualité autour de ce navire, l’aquarius, que personne ne veut accueillir sauf l’Espagne.

Cette lettre adressée à notre président est longue et chargée, un peu plus de 360 pages au cours desquelles Yann Moix, c’est le moins que l’on puisse dire, n’y va pas avec le dos de la cuillère. Emmanuel Macron n’est pas épargné, dans ses actes et ses paroles et son ministre de l’intérieur, Gérard Collomb non plus.

Yann Moix, après avoir justifié le titre de son ouvrage, rappelle l’importance des mots en précisant la différence entre un exilé et un migrans pour bien nous faire comprendre que ce sont bien des exilés qui sont présents sur notre territoire et non pas des migrants.

"Le migrant s’en va quand bon lui semble ; l’exilé n’a pas le choix. Le migrant peut rebrousser chemin ; l’exilé ne se retourne pas. Le migrant reviendra, l’exilé ne reviendra pas. Le migrant est partout chez lui, l’exilé n’est chez lui nulle part. L’un doit faire sa place, l’autre doit la trouver. Le migrant est dépaysé, l’exilé est traumatisé. Le migrant est en plus, l’exilé est en trop. La migration est un au revoir, l’exil est un adieu. La migration est une possibilité, l’exil est une nécessité. La migration est un bonheur, l’exil est un malheur. La migration est voulue, l’exil est subi."

Les mots à l’égard du président sont durs. Yann Moix s’appuie sur ses promesses de campagne non tenues, sur les philosophes dont il se réclame et sur ces discours hypocrites. Enfin, il le tient pour responsable, au même titre que son ministre de l’intérieur, des exactions menées par la police française à l’encontre des exilés présents à Calais. Il revient sur les accords du Touquet, signés par un autre président qui place la frontière entre le Royaume-Uni et la France sur notre territoire, faisant de nous, "la Libye" du Royaume-Uni. On apprend d’ailleurs qu’il existe d’autres accords restés mystérieusement secrets entre les deux Etats au sujet de cette frontière. Il dénonce aussi les millions d’euros dépensés inutilement pour construire des barrières, des détecteurs de CO2 et des détecteurs de battements cardiaques pour traquer les exilés. Quelle honte quand on sait qu’au final ces exilés réussissent souvent à passer dans la plus grandes hypocrisie !

Yann Moix s’appuie sur des histoires de vie d’exilés qu’il a rencontrés à Calais. Des gens intelligents, parlant très souvent plusieurs langues, des lettrés, des scientifiques, loin des clichés véhiculés par les informations qu’on veut bien nous donner. Il nous raconte pourquoi ils ont dû fuir leur pays, expliquant pourquoi c’est un devoir pour la France de les accueillir dignement et qu’ils peuvent être un plus pour notre pays, à condition de les voir différemment.

Sauf que pour Yann Moix, notre président est loin de le penser. Lui qui se limite à leur faire passer des tests osseux pour aboutir tout le temps au fait qu’ils sont majeurs et donc expulsables. Avec comme fidèle lieutenant, Gérard Collomb. Et là encore, les mots sont durs mais tellement vrais.

"Et ce pauvre ministre, Javert cacochyme jailli de son placard comme un génie de sa fiole, que vous nommâtes à l’intérieur pour assurer la sécurité de notre pays. Relégué depuis tant de lustres, aux bâtiments de l’oubli ; frotté à tous les grattoirs de l’humiliation, son frein était presque tout entièrement rongé quand le miracle est venu le soustraire au bain du vinaigre dans lequel il s’aigrissait. Revenu de tout sans être jamais allé nulle part, il exerce son pouvoir avec l’insatiable appétit de celui qui après un demi-siècle de solfège peut enfin s’asseoir au piano. Pour lui, tout arrive au moment au moment où tout s’achève. A la jeunesse, nul vieillard n’est tenu. Avec ce gouvernement de galopin, il n’a de commun que la morgue."

Alors voilà, j’ai adoré cette lettre ouverte au président pour deux raisons. D’abord car je ne me reconnais pas dans cette politique menée par notre gouvernement. Cette France là n’est pas la mienne et elle ne le sera jamais. Yann Moix fait preuve d’un grand courage en s’opposant avec une telle virulence à notre président. Il assène des vérités, les unes après les autres, des vérités qui font mal et qui déshonorent la France, patrie des droits de l’homme.

J’ai enfin adoré ce livre car il est merveilleusement bien écrit, comme tous les livres de cet auteur. Yann Moix fait partie de ces auteurs qui m’obligent à avoir un dictionnaire à mes côtés pour comprendre certains mots de la langue française que je ne connais pas. J’apprends à ses côtés et j’adore ça.

Enfin, je me suis surpris à rire de nombreuses fois, non pas à la lecture du sort des exilés, mais aux excellentes descriptions que Yann Moix fait de Gérard Collomb et d’Edouard Philippe. En les relisant à voix haute, ce fut un pur bonheur.

Dehors est donc un excellent livre que je vous invite vivement à lire pour mieux comprendre la situation des exilés dans notre pays et l’aberrante politique choisie par notre gouvernement pour y remédier.

 
En savoir plus :
Le Facebook de Yann Moix

Jean-Louis Zuccolini         
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