Seul en scène conçu et interprété par Didier Brice d'après un texte de Marivaux.
Il arrive sur scène avec tout son barda de colporteur et salue la compagnie. Habillé comme un personnage de "Jacques le Fataliste" de Diderot ou un comparse du "Gil Blas" de Lesage, on le sait d'avance sorti d'un récit d'apprentissage et prêt à raconter ses heurs et ses malheurs de chevalier d'industrie ou de condottière.
Le courant passe tout de suite avec le public. On le sent sympathique et filou, beau parleur et bon buveur. D'ailleurs, quand il entre sur le plateau en tortue portant sa maison sur lui, il n'a pas que des bouts de bois et des toiles dans tout son fatras et a pris la précaution de se munir d'une demi-douzaine de bouteilles.
Pendant qu'il va se raconter dans "L'homme sans souci",, Didier Brice va utiliser tous les éléments hétéroclites dont il s'est chargé pour construire quelque chose. Logiquement, il ne faudrait pas dire quoi car, en soi, s'il ne disait mot et se contentait de transformer ingénieusement tout ce qu'il a apporté, on aurait un moment déjà unique de poésie...
Mais il parle ! Et quelle langue ! Expressive et pleine de vie, habile en formules qui se retournent avec élégance, elle tire son matériau de base d'un récit de Pierre de Marivaux,"L'indigent Philosophe". Passé à la postérité pour son théâtre, l'auteur des "Fausses confidences" a laissé, à l'image du texte adapté par Didier Brice, une abondante œuvre en prose qui ne comprend pas que "La vie de Marianne".
Evidemment, Marivaux est ici revu et adapté par le comédien enclin, au fil des représentations, à faire de plus en plus réagir et participer ses spectateurs et a rajouté son grain de sel.
Son personnage, sans être une caricature, n'est pas loin de s'inscrire dans la come-back dell'arte. C'est tout à fait plausible qu'il y ait des échanges inattendus avec un public mis en confiance par la proximité de l'acteur. Celui-ci ne demande-t-il pas à une spectatrice de ravauder une de ses nippes ?
Didier Brice, dont on n'a pas oublié "Le journal d'un poilu", maîtrise l'art d'être en scène. Il se régale dans ce rôle où il peut, mine de rien, s'interroger sur le fameux paradoxe du comédien du déjà cité Diderot.
On ne pourra qu'inciter vivement les amateurs d'un théâtre authentique à venir le découvrir. Sa foi dans l'art dramatique, sa générosité à la faire partager font de Didier Brice un excellent passeur qui ne laissera personne indifférent et qui peut constituer une excellente entrée pour ceux qui n'osent pas faire un pas vers le spectacle vivant. |