Spectacle écrit, mis en scène et interprété par Marielle Rémy et Guillaume Servely.
On les avait quittés avec leur lit il y a un an dans "Récits de lit", un spectacle qui avait enchanté le Festival d’Avignon trois années de suite et parcouru la France, et on avait hâte de les retrouver et curieux de savoir si ce deuxième volet de leur "Trilogie de l’intime" (le troisième volet en sera la table en 2009) serait à la hauteur du premier.
Dans de très jolis costumes (signés Fabienne Desfleches et Elise Baldi) qui nous emmènent dans leur monde à eux, un monde en rouge et blanc tout en magie et en mouvement, on les retrouve dans un bruit d’eau. Chacun est dans sa baignoire. Lui, rempli de doute. Elle, remplie de regrets. Et tous les deux dans le flou, la peur à ras bord : une fille à naître, un père qui meurt et la vie à affronter…
Et c’est parti pour un ping-pong de baignoire à baignoire sans cesse recommencé. Les coques font des échos qui donnent une ambiance et dansent avec eux au rythme des flots de phrases. Des phrases qui parlent à tous et nous font rire ou nous étreignent d’émotion. Baignoire-bouclier pour se battre contre l’injustice de ne pouvoir dire à son père tout ce qu’on aurait voulu ; baignoire-coquille pour ne pas voir sa femme n’être plus femme mais mère et croire qu’on va perdre la première place dans son cœur.
Tout cela interprété par ces comédiens-acrobates donne des images d’une beauté absolue. (A noter les formidables lumières de Jean-Charles Esnault qui concourent au rêve et font apparaitre des ombres magnifiques).
Autant le dire tout de suite :"Récits de bain" est au moins aussi réussi que "Récits de lit". D’abord parce qu’il est extrêmement sincère et plein de douceur, sans tabous mais avec une infinie pudeur. Marielle Rémy et Guillaume Servely s’y mettent à nu comme rarement auteurs et comédiens réunis le font. Ils sont radieux de générosité. Ensuite parce que ce spectacle ose tout et nous surprend en permanence ; avec un geste qui nous touche, une phrase qui nous bouleverse, des mots qui nous amusent ou une trouvaille visuelle étonnante.
Le tout avec une légèreté étincelante et une poésie qui vient nous tirer par la manche si on veut bien la suivre. Il y a une grâce qui les porte tous les deux et fait de l’un l’écho de l’autre, son miroir ou son révélateur, son complice de jeu, de mots, son oreille, sa béquille, son nord, son sud et tout son contraire…
L’histoire d’une double éclosion au sortir de cette mer (mère) de mots… pour enfin oser endosser ensemble leur peau d’adulte, la vie et la mort réconciliées.
Un spectacle rayonnant par deux immenses auteurs-acteurs-baigneurs. |