Comédie dramatique de Anton Tchekhov, mise en scène de Volodia Serre, avec Jacques Alric, Olivier Balazuc, François de Brauer, Carol Cadilhac, Juliette Delfau, Mireille Franchino, David Geselson, Anthony Paliotti, Alexandrine Serre, Joséphine Serre, Léopoldine Serre, Volodia Serre, Jacques Tessier et Marc Voisin.
Entre l'"Oncle Vania" qui dépeint un attentisme quasi janséniste face à un non-avenir et "La cerisaie" qui ocrée la rupture avec la sphère du passé, Anton Tchekhov a écrit "Les trois soeurs" saisissant la pétrification psychique d'une famille exilée en province qui s'est construit un leurre, l'eden moscovite, pour nourrir son aspiration apathique à une vraie vie.
Pour orchestrer cette symphonie tragique dont les instrumentistes tournent en rond en attendant un désastre pressenti, Volodia Serre, comédien et metteur en scène, s'est placé la barre très haut en indiquant dans sa note d'intention que, dans les mises en scène de la pièce qu'il avait pu voir, le traitement de la fratrie lui semblait toujours faire défaut. Indigence à laquelle il apporterait remède, ayant trois soeurs actrices, certainement connues notamment du public téléphile, et se distribuant dans le rôle du frère, dans une vision "personnelle".
La déception n'en est que plus vive. Après la mise en scène histrionique de "Le suicidé" de Nicolaï Erdman présenté au Théâtre 13 en 2008, Volodia Serre bloque, en l'espèce, la pédale sourdine pour une mise en scène quasiment académique dans un décor sorti du magasin des décors du théâtre d'après seconde guerre mondiale avec effets faussement réalistes, tels que bruit du vent et fausse neige à l'ouverture de la porte.
Quasiment car sévit la désormais incontournable touche d'anachronismes avec les arbres stylisés, les intermèdes musicaux d'outre-Atlantique, les costumes années 60 de deux des soeurs et de la belle soeur (avec les apparitions vaudevillesques de la pétulante Juliette Delfau), celui de la troisième lorgnant davantage vers un pseudo-romantisme à la George Sand et, surtout, allant jusqu'au bout d'une catharsis théâtro-familiale, la diffusion de films super 8 extraits de ses archives familiales.
Au demeurant cette réunion de famille n'apporte aucune valeur ajoutée en matière d'intensité émotionnelle ou acuité dramaturgique, Léopoldine Serre, Joséphine Serre et Alexandrine Serre ne parvenant pas, de plus, à nourrir l'incarnation de leur personnage.
Carol Cadilhac, François de Brauer, Jacques Tessier, Jacques Alric et Mireille Franchino (ces trois derniers en médecin et domestiques tout droit sortis d'une gravure d'époque) servent bien leur partition et David Geselson, Anthony Paliotti et Olivier Balazuc sont excellents. |