Platform, le second opus de l’artiste californienne Holly Herndon se propose comme une porte d’entrée vers l’air du connecté augmenté. Comprendre que la musicienne rejoint le gang des artistes qui se proposent d’explorer les liens entre l’humain, la société et internet. Loin de l’approche phobique d’une M.I.A. ou hyper sexualisée d’un Ballerino, Holly Herndon s’applique à décortiquer et mettre en lumière de nouveaux modes d’expressions pour les sentiments.

Si le manifeste est au mieux obscur, le son lui se fait vaporeux et aérien, hachuré et elliptique. Avec un rendu presque oppressant, Platform s’applique à disséquer le chant aux notes élevé d’Holly, pour mettre en valeur l’omniprésence de l’électronique. Un jeu de questions / réponses mené à bâtons rompus entre deux entités s’accordant sur une direction commune et pointant douloureusement sur notre addiction au net.

Filé et lacunaire, le verbe de Holly ne demande qu’à être complété par nos propres cerveaux, propulsant ainsi  Platform  au niveau d’un album interactif, un peu à la manière des livres dont vous êtes le héros. Et qu’est-ce qu’internet, sinon un lieu d’expression débridé et ouvert à tous ?

Et alors que le single "Home" met en lumière les relations désincarnées, "Interference" enfile une forme sonique inattendue. Un costume audio invasive et transportant l’album vers son point culminant : une électro pop d’avant-garde, presque abrasive mais étrangement envoûtante.

Platform s’invente et s’affirme un peu plus titre après titre tout en exagérant ses contours. Plus de détournements de pubs, plus de communications flirtant à la limite du voyeurisme conduit Holly Herndon à la limite de la dénonciation. Pourtant, le propos de l’artiste est bien de lancer un pont entre nos attitudes connectées et de consommation, mais également d’ouvrir la porte à toute une nouvelle forme de narration. Bienvenue dans cette nouvelle ère.