Performance poétique conçue et interprétée par Sébastien Bidault accompagné par le musicien Jean-Baptiste Perraudin.
Assis dans une humble posture, l'air juvénile, vêtu d'un costume noir qui, nonobstant l'absence de brassard blanc, évoque un premier communiant des années 1960, l'officiant a un regard égaré et néanmoins facétieux.
Il parle lentement, avec un soupçon d'hésitation et d'affectation précieuse, et happe l'attention du spectateur. Et tout aussi rapidement une analogie - élogieuse - s'établit avec l'attitude de clown triste du comédien et humoriste Jean-Jacques Vanier.
Avec son "air de ne pas y toucher" et sa gestion du silence, Sébastien Bidault instaure immédiatement un lien empathique en dispensant un florilège de textes issus de l'anthologie personnelle de son oeuvre poétique de Michel Houellebecq sans doute connue de ses seuls fans addict.
Sous le titre "On jette un dé, milord Snake", il propose une invitation au voyage dans l'univers houellebecquien qui, malgré ses thèmes baudelairiens, n'est pas "luxe, calme et volupté" mais "vide, ennui et immobilisme".
La sélection opérée dans une poésie du quotidien dépourvu(e) de lyrisme et au verbe plat, des banlieues grises et monotones, d'une nature sans immanence, d'une petite vie banale sur laquelle plane l'ombre de la mort, contribue à dresser le portrait d'un homme mélancolique dont l'état au monde ressort davantage à une inadaptation au monde que d'un mal de vivre et qui amène vers un infime horizon de bonheur possible.
La combinaison dramaturgique des textes se révèle en résonance totale avec les propos tenus par l'auteur commentant l'exposition "Michel Houellebecq - Rester vivant" dont il était le maître d'oeuvre au Palais de Tokyo en 2016 : "Un démarrage très plombant, sinistre, avec une réalité indiscutablement réelle, une longue partie intermédiaire où ça part un peu dans tous les sens, ce que j’appelle le n’importe quoi mégalomane, et une fin très évanescente".
Accompagné et soutenu par une création acoustique en live, celle du batteur Jean-Baptiste Perraudin qui ne tape pas sur un bambou mais sur les singuliers instruments percussifs que sont le udu nigérien et le cajón péruvien, Sébastien Bidault délivre donc une performance poétique incarnée et aboutie qui évite l'écueil du récital de salon.
Une proposition immersive à découvrir notamment comme première approche d'un écrivain parfois considéré comme l'ennemi public de la littérature française. |