Seule en scène écrit et interprété par Isabelle de Botton dans une mise en scène de Michèle Bernier.
Dans son spectacle autobiographique, Isabelle de Botton parle peu de "Moïse", peu de "Dalida"et beaucoup de "moi".
Appartenant à la communauté francophone vivant dans l'Alexandrie cosmopolite des années cinquante, Isabelle de Botton est une toute petite fille quand le beau rêve doré tourne au cauchemar.
Finies les grandes maisons ensoleillées, évanouis les personnages élégants dans leurs belles décapotables, bientôt loin du coeur les domestiques aimant leurs gentils maîtres occidentaux...
Car il y a le "méchant Nasser" et la fin de l'ère coloniale en Égypte qui se profile comme dans toute l'Afrique, même si les Français et les Anglais tentent un ultimatum baroud d'honneur pour sauver leur canal de Suez et leurs gros sous.
Evidemment, nageant dans le bonheur d'une famille où tout le monde est gentil et truculent, la petite Isabelle ne perçoit pas tout et n'a pas d'analyse géopolitique quand son papa est arrêté. Comme elle raconte aujourd'hui avec beaucoup de cœur et de couleurs son histoire d'enfance, on admettra que sa vision du monde n'ait guère changé depuis.
Isabelle est une petite sœur d'Albert Cohen en écriture : comme lui, elle décrit ses "valeureux", confectionne les plats arabes avec une pointe de judéo-malice. Tous les personnages qui passent à sa portée en ressortent plein de miel et d'amour, sans jamais dégouliner ni devenir sirupeux. Elle a l'art de décrire de beaux sentiments en évitant leur trop-plein.
Et puis, il y a le retour sur terre française. Bon, Isabelle n'est pas une boat people et l'atterrissage se fera en presque douceur à Neuilly-sur-Seine, une banlieue heureusement plus gaulliste que nassérienne. Mais, tout de même, il faudra se réadapter socialement et Isabelle en tire une troisième partie moins amusante, plus dans la nostalgie du paradis perdu qui s'éloigne au fil des ans.
Dans quelques éléments en plexiglas, Michèle Bernier a posé son amie Isabelle dans un joli écrin de complicité. "Moïse, Dalida et moi", dans sa version revue, est une jolie machine à rire et à sourire. Isabelle de Botton joue et écrit bien. Son Orient de films égyptiens du temps du roi Farouk fera autant rêver ceux qui l'ont vécu que ceux qui l'ont combattu. |