Comme une envie de te dévoiler un dossier top secret...
C'est l'histoire d'un disque délaissé. Sous son emballage impeccable, il se désolait de passer, de mains en mains, de sacoche en sacoche, de table d'écoute en table d'écoute. Les regards le flirtaient et se détournaient aussitôt ! - Si prêt du but - Un jour, pourtant, il s 'imposa à moi : lui et tous ses secrets.
Imagine...
"Je le ferai vibrant et mystérieux !", cria-t-il d'un ton quasi démoniaque. "Ahahahahahah !".
Ce jeune adolescent, cheveux en bataille, yeux furibonds, n'était autre que Louis Jones qui venait tout simplement de péter les plombs. Bercé par les Rollings Stones et quelques autres grands classiques, son désir le plus fort était de monter un groupe qui cartonne, au grand dam de ses parents qui lui imaginaient plutôt une carrière dans le milieu bancaire. Alors, secrètement, il s'entraînait, écrivait, composait, chantait, grattait guitare, basse… sans relâche. Parfois son frère, Will, l'accompagnait à la batterie. Le jeune british voulait à tout prix percer dans la pop, coûte que coûte.
Seulement voilà...
"Bleu électrique ! Ouaiiiiis !", poursuivit-il les yeux illuminés.
Plus tôt, apprenant que sa copine le larguait pour son voisin, John, le joueur de hautbois qui avait toujours rechigné à l'accompagner lors de sessions improvisées, il décidait d'en finir les pieds nus dans son bain, la guitare électrique entre les mains. "On se souviendra de Spectrals" avait-il crié en s'élançant dans la baignoire. Emporté par sa folie, il avait cependant oublié les goûts démesurés de sa maman... Dans sa course, sa guitare heurtait violemment le gigantesque lustre qui se décrochait et tombait sur sa tête. Plus tard, nu comme un verre et échevelé, il n'avait qu'une seule idée en tête : enregistrer l'album de sa vie. "Je l'appellerai Bad Penny parce que ça fait hype !" Oui ! Il offrirait au grand jour son œuvre à son public tant chéri et en délire, cette couverture "garage" bleu roi, sur laquelle trônerait le titre hype d'une écriture vibrante. Il s'empara d'un cadre photo et le brisa pour en découper sa photo et "je serai là !", conclut-il triomphal.
Il enregistra et mixa toute la nuit...
Et voilà le résultat...
Sur un lit de guitares vaporeuses, "Get a trip" ouvre l'album. Une ambiance vibrante et hawaïenne m'entoure. Je m'imagine cocotiers, surfers et sable chaud - la résonnance de la salle de bain y est sûrement pour beaucoup. Et puis, très vite, Spectrals se met à chanter. Il a cette voix légère, un peu cotonneuse et vaseuse - les effets de tranquillisants, sans aucun doute - il me rappelle un style année 80, rétro. Et à vrai dire, dès ce premier morceau, les clés de compréhension sont là : guitares vaporeuses et voix dissonante. Les onze titres se succèdent, respectant consciencieusement ce fil rouge. Certes parfois plus lent, et langoureux comme sur "Lockjaw" ou "Many Happy Returns", planants comme sur "Luck is There To Be Pushed" ou "Brain Freeze". Le chanteur y parle bien sûr d'amour, le cœur brisé, la tête chamboulée.
De l'appréhension...
Malgré tout, Spectrals porte à la lumière des projecteurs un album joyeux et planant. A déconseiller aux oreilles fragilisées par le foisonnement de notes légères et hawaïennes. Pour les tympans curieux, why not pour démarrer les vacances, ou dans sa baignoire. A vous d'imaginer... |