Après Les invisibles et Malamorte, Antoine Albertini, ancien correspondant du Monde en Corse, nous propose sa plume aiguisée pour mieux nous replonger dans la Corse noire, celle des coulisses, loin des images de carte postale et des clichés : les nationalistes au pouvoir, d’anciens barbouzes prêts à tout pour solder leurs comptes, le passé qui ne passe pas et un héros, toujours en quête de vérité, et de son grand amour.
Devenu détective "sans bureau ni diplôme", un ancien politicien porté sur la boisson est chargé de retrouver la trace de Baptiste Maestracci, un vieillard disparu de son village en Corse. De découvertes en cadavres oubliés, d’une mystérieuse demeure inhabitée aux plages de la côte sarde en passant par les ruelles de Bastia et le cimetière de Bologne, le privé clandestin va mettre en lumière trente ans d’histoire secrète de son île, entre négociations de l’ombre, assassinats et compromissions.
On retrouve donc avec ce nouvel ouvrage le policier que l’on avait rencontré dans Malamorte, qui prend la charge de détective pour ce nouvel opus. Un vieux parrain corse qui meurt, un ami, proche du milieu nationaliste qui lui demande comme service de retrouver un vieil oncle qui ne donne plus de nouvelles, il n’en fallait pas moins pour occuper cet apprenti détective corse. Sauf que la disparition, la fugue de ce vieil oncle, ce qui semblait au départ presque un non-évènement va avoir des conséquences importantes.
C’est une Corse gouvernée par les nationalistes que nous décrit Albertini, une Corse dirigée par ceux qui voudraient l’autonomie mais qui peinent à se mettre d’accord entre eux. Comme toujours, comme dans tous les partis politiques se trouvent des dissensions, des oppositions d’idées, souvent liées à des anciennes tensions, à des histoires de clans, à des vieux ressentis ou des conflits internes. Dans une Corse habituée à la violence et aux règlements de compte, cela devient alors très compliqué de gouverner.
Mais ici, l’histoire de l’ouvrage ne se limite pas à celle de la Corse car tous ces clans mafieux ont des origines, des ramifications qui débordent de l’île de Beauté. Banditi nous rappelle les années de plomb, entre les années 60 et 80 qui virent l’Italie s’exposait à la violence de rue, à la lutte armée et au terrorisme. L’auteur nous parle aussi des différents mouvements autonomistes corses qui remportent des élections dans les années 90, qui se menèrent une guerre fratricide, des magouilles, des détournements de fonds. On se souvient des frères Orsini, du FLNC, des conférences de presse cagoulées dans le maquis, du MPA, du FLNC canal historique mais aussi des règlements de compte et des assassinats, notamment celui du préfet Erignac.
En fin connaisseur de son île de Beauté, l’auteur nous propose donc un portrait très sombre de la Corse autour d’une intrigue assez classique, nous montrant que les vieux démons corses sont encore bien présents aujourd’hui, empêchant la Corse de se développer comme il le voudrait, comme il le faudrait. |