Sur la scène
musicale underground depuis quelques années, les
Waiting for Words prennent enfin le taureau par les cornes
pour percer le mur du silence dans un registre musical qui, s'il
n'a pas les faveurs des médias, a un vrai et fidèle
public.
Dans un genre qui reste très influencé par la new
wave, ils viennent de sortir un album autoproduit intitulé
A walk through the night
ouvert sur différents horizons musicaux, tant rock
que pop... découvrez les dans cette interview de celui par
qui tout est arrivé Nicholas Dumayne.
Waiting for words n'est pas un nouveau venu sur
la scène musicale française, cela étant, il
reste peu connu. Pouvez vous nous en rappeler la genèse ?
Nicholas : Je vais essayer de faire simple. Début
des années 90 après avoir eu quelques expériences
avec d’autres groupes, j’ai décidé de
créer le mien avec des amis. C’est devenu sérieux
à la rentrée 91 quand j’ai rencontré
Nikos Farmakidis qui m’a accompagné au clavier dans
une formation duo techno pop avec synthé et boite à
rythmes. Ensuite nous ont rejoint un guitariste et un batteur.
Nikos est parti début 94 et dans les années
95-96 le groupe est vraiment devenu formation basse-batterie-guitare
toujours synthé et samplers pour donner les mélodies
mais on était vraiment formation rock.Cela jusqu’en
99 où le groupe a splité complètement…pour
de bon… du moins le croyait-on.
Chacun est parti de son côté mais
moi au bout de 2 ans j’ai eu envie de m’y remettre.
On m’a proposé de faire une musique pour un court métrage
et j’ai créé le site Internet pour prendre la
température. Les conditions actuelles pour faire un groupe
sont différentes de celles d’il y a 15 ans. Nous avons
bénéficié de chroniques et de passages en radio.
Quand j’ai remis le couvert j’étais seul et j’ai
contacté un co-producteur, Stone Cold, qui fait des remixes,
de la bidouille, de la musique électronique car je voulais
qu’il m’apporte un peu le côté son étrange
et enregistrement direct sur ordinateur avec les nouvelles technologiques.
Car paradoxalement pour un groupe électro, au début
on enregistrait en manuel sur un 4 pistes.
Nikos a retrouvé le groupe en fin d’année
2003 ce qui a reconstitué le duo de base. Quand nous avons
repris les concerts, l’ancien batteur, qui avait quitté
le groupe en 98, venait ponctuellement faire le bœuf avec nous
et nous a dit qu’il voulait bien faire 3-4 morceaux avec nous.
Et puis finalement il fait tout le set et il part avec nous sur
les 4 dates de la tournée anglaise. Nous sommes tous des
trentenaires qui n’ont pas réussi à décrocher.
Nous sentons que quelque chose est possible aujourd’hui et
nous mettons donc le paquet.
Vous venez de parler de votre tournée en
Angleterre, ce qui paraît paradoxal s’agissant d’un
groupe français ayant une audience pour le moment assez limitée.
Nicholas : C’est la magie d’Internet.
J’ai vu un mec qui postait sur un forum qu’il cherchait
des gens pour passer sur Coventry. Le fait que nous chantions en
anglais supprime toute barrière. Il y a donc eu la première
date. Ensuite ils ont un magazine French violation qui est un forum
de fans de Depeche Mode et qui a chroniqué notre album. Ils
ont été contactés par une personne qui organisait
un concert le 11 juillet et ils nous ont filé ce contact.
Nous avons bouclé les dates du jeudi et du vendredi. Ensuite,
il est très facile d’avoir des dates quand on dit que
l’on vient de France, de Belgique ou d’Italie. C’est
plus facile à l’étranger où nous avons
trouvé 4 dates en 48 heures qu’en France où
c’est la galère. En France, c’est morose globalement.
Avez-vous une idée des salles où
vous allez jouer ?
Nicholas : Il y en a 2 qui sont sures. A Coventry,
la date est sure. Nous passons dans un club The Spencer qui s’est
ouvert il y a 6 mois et le dimanche nous jouons dans un club assez
coté à Londres The underworld. Pour les 2 autres dates,
c’est encore en négociation pour déterminer
la salle la plus opportune.
Y a-t-il une possibilité de voir débarquer
dans ces salles un label anglo saxon ?
Nicholas : Nous avons quelques contacts avec des
labels anglosaxons mais aussi américains et pour également
des projets de concerts. C’est l’intérêt
d’Internet car les gens viennent sur notre site et la réponse
est quasi-instantanée car on aime ou on aime pas. C’est
ainsi que nous avons été diffusé sur une web-radio
newyorkaise. Nous avons une personne chargée de notre communication
et de notre promotion qui cherche des contacts anglosaxons car les
directeurs artistiques de ces labels se déplacent et vont
voir les groupes en concerts. Car ils ont encore la culture de chercher
et découvrir par eux mêmes en mettant les mains dans
le moteur. Allez faire déplacer un directeur artistique français
! On peut attendre longtemps.
Sauf à trouver un petit label…
Nicholas : La crise actuelle des majors va relancer
les indépendants. Il y a une petite période transitoire
mais on reviendra peut être à la période des
années 80 où les indépendants découvraient
les artistes et les géraient jusqu’à 70 000
disques.
Cela étant y a-t-il en France un label
qui corresponde à votre registre musical ?
Nicholas : La difficulté est que tous les
labels indépendants français sont morts dans les années
90 parce qu’ils ont été rachetés ou bouffés
par les majors. Nous chantons en anglais donc autant dire que c’est
carrément grillé alors qu'il y a des exemples comme
Phoenix que j’ai découvert en Angleterre parce qu’ils
passaient sur MTV et je n’ai appris que cette année
que c’était un groupe français quand ils ont
fait la couverture de Magic. Il y des exemples de groupes chantant
en anglais qui marchent. Il y a Air même si sur le premier
album la voix était tellement vocodorisée qu’on
ne comprenait pas la langue et qui depuis chante en anglais.
Mais les maisons de disque restent très
frileuses. C’est la raison pour laquelle on vise davantage
les labels belges, anglais, allemands, américains voire japonais.
Phoenix a cartonné aux Etats Unis et au Japon. D’ailleurs
Phoenix que l'on critiquait sur ce phénomène a répondu
On préfère remplir des stades de 20-30 000 places
à l’étranger que de 300 en France. On veut vendre
aussi. Il y a un public à ne pas dénigrer.
De là à dire que l’ambition
de Waiting for Words soit de remplir les stades ?
Nicholas : Non, non. Mais quand j’entends
des musiciens qui se moquent de la gloire… à ce moment
là son disque on ne le met pas dans une enveloppe pour l'envoyer
à BMG ou a Sony. Il faut être réaliste aussi.
Nous aimerions en vivre, et en vivre raisonnablement. Nous pensons
clairement que nous arrivons à toucher un public relativement
large et les retours à partir de notre site le prouvent.
Et il s’agit d’un public d’horizon musical varié.
Donc pourquoi pas ?
Mais pour le moment, vos disques sont toujours
en autoproduction ?
Nicholas : Oui. Nous avions eu une fois un contact
assez sérieux avec Mute France mais à un mauvais moment
quand Mute France a été rapatrié en Angleterre.
Il faut dire également que jusqu’à présent
nous n’étions pas animés d’une réelle
volonté de démarchage tout simplement parce que nous
ne nous sentions pas prêts. D’autant que nous n’étions
même pas certains de ce que nous voulions.
Maintenant, vous avez un manager. Avez-vous entamé
des choses concrètes ?
Nicholas : Non. Nous allons commencer du fait notamment
des concerts anglais. Nos morceaux se sont améliorés
avec l’apport du batteur. Nous allons ajouter de nouveaux
arrangements et le gros du démarchage est prévu pour
septembre octobre.
Parallèlement avez-vous des contacts pour
des tremplins, des festivals ?
Nicholas : Nous avons un contact pour un gros festival
d’été mais sans certitude encore. Nous en avons
aussi pour une édition 2005 car c’était trop
juste pour cette année d’autant que cela tombait au
milieu de nos concerts en Angleterre. Cela étant, le choix
se serait posé entre des concerts de 300 personnes mais qui
constituent vraiment notre public et qui viennent pour écouter
notre style de musique et un festival de 80 000 personnes qui vous
écoutent d’une oreille à la buvette et vous
ont oublié le lendemain …
En revanche, le facteur intéressant est
la présence d’une foultitude de médias…
Nicholas : …c’est pourquoi nous avons
préféré partir sur une optique 2005 pour nous
préparer en fonction de cet événement.
Vos concerts ne sont pas que sonores. Il y a une
volonté de les enrichir d’un visuel...
Nicholas : En fait, mon frère travaillait
dans la scène techno il y a 10 ans et a créé
l’association Happyland qui a fait les plus grosses raves
de la Défense avec LFO, Garnier,… de 92 à 94.
Il a ensuite créé son studio de graphisme V-Form où
il faisait des images de synthèse, des créations 3D
visuelles et mixait en même temps que les DJ. Pour ma part,
je voyais que les groupes comme Depêche mode et U2 commençaient
à intégrer des visuels. En 93-94, j’ai proposé
à mon frère de mixer son univers 3D techno avec l’univers
rock. On a repris cette idée en 99.
Nous avons beaucoup travaillé en fonction
des morceaux. Il est clair que l’on ne peut pas le faire partout
en raison de la taille des salles. Par exemple ce n’est pas
possible à la Balle au bond. Et puis le visuel c’est
un gros budget. En raison des nouvelles technologies on peut le
limiter. Les gens ont été complètement bluffés
! V-Form n’existe plus officiellement mais ils vont peut être
s’y remettre.
Il est vrai aussi que quand on est 5 musiciens
on peut parfois se mettre un peut en retrait. Mais quand on est
tout seul avec un batteur et un clavier c’est très
fatigant et le visuel pouvait prendre le relais. Et le visuel est
complémentaire de la musique.
Un batteur, un clavier c’est la formation
actuelle. Vous jouez d’un instrument ?
Nicholas : En studio, je joue beaucoup de clavier
et j’ai fait toute la partie guitare de l’album. Mais
en live je ne me suis pas senti trop à l’aise. C’est
donc le chant plus quelques parties solo. Nous cherchons à
intégrer un guitariste. Le batteur joue sur un kit électronique
qui permet de bien voir ce qu'il fait car il n’est pas masqué
par des tonnes de fûts et il est vraiment dans le truc.
Sur scène concrètement ça
donne quoi ?
Nicholas : Batterie, clavier, samples et voix.
Nous avons fait une grande salle avec les visuels. Sur la péniche
La balle au bond c’est hyper limite. Nous n’avons eu
aucune réflexion quant à la maigreur du groupe.
Ça reste néanmoins live ?
Nicholas : Ça reste hyper live. D’abord
il y a des chansons pop rock, on n’ oeuvre pas dans le style
Client, Miss Kittin ou Ladytron que j’aime beaucoup. Je n’ai
pas changé ma manière de composer et nous voulons
conserver l’énergie rock. Avec la batterie ça
donne la pêche.
Il n’en demeure pas moins que Waitings for
words officie dans un univers new wave très marqué
et ne cache pas l’influence majeure de Depeche Mode. Cela
ne peut-il pas constituer un inconvénient car actuellement
la new wave n'a pas bonne presse ?
Nicholas : Elle n’a pas bonne presse mais
quand on regarde Indochine c’est plus d’un million d’albums
vendus, le come back de Duran Duran pour vingt cinq dates sold-out
dont cinq Wembley et Sony vient de leur signer un contrat de 42
millions de dollars, Tears for fears dont le projet a avorté
à cause du licenciement de celui qui les avait signé,
le retour de Cure, le futur nouvel album de New Order, la grosse
demande vers Orchestral manœuvre in the dark pour qu’il
remette le couvert. De plus tous ceux que je vous ai cités
constituent les influences des jeunes groupes d’aujourd’hui.
Par ailleurs, j’ai été impressionné
par l’étendue du public gothic new wave sur Paris quand
on a fait notre promotion, bars, soirées, disquaires. Quand
on voit le succès d’un groupe comme Placebo, directement
influencé par Cure et Depeche Mode… Cela ne m’inquiète
pas. Mais il est vrai que les médias ont tendance à
ne pas en parler ou à en parler de manière négative.
J’ai acheté le dernier Rolling Stones et ça
me fait marrer de voir qu’il consacre six pages à Beyonce
et une à Cure. Il y a quand même un problème.
Leurs critères sont purement marketing
et commerciaux et non artistiques.
Nicholas : Tout à fait. Mais d’un
autre côté notre groupe ne se cantonne pas à
la new wave. Le morceau "Joy" sur l’album est très
guitares funk avec des breaks, avec un solo très jazzy. "Above
the sky" est un morceau pop. "Resign" flirte avec
le trip hop avec les rythmiques dans une ambiance un peu Moby. D’où
notre audience plus large.
La reprise de Depeche Mode est une signature sans
ambiguïté et définitive et un risque à
prendre. Vous aviez d’ailleurs hésité à
la mettre sur l’album.
Nicholas : C’est exact. Mais le morceau diffère
complètement de l’original, il est très guitare.
Nous connaissions le risque encouru avec l’étiquette
Depeche mode et c’est la raison pour laquelle nous avons commencé
à faire notre promo en direction des fans de Depeche mode.
Car les fans de Depeche mode sont impitoyables. Si un groupe fait
du copier-coller, il se fait laminer en cinq secondes. Comme ces
fans nous recevaient positivement, percevant l’influence de
Depeche Mode mais aussi notre propre style, c’est flatteur.
Vous parlez aussi d’une reprise de Bowie.
Nicholas : Nous avons fait "I’m afraid
of americans" en live. Mais en studio nous n’en étions
pas très satisfait donc nous ne l’avons pas retenue.
Nous la retravaillons et nous la mettrons gratuitement sur le site.
Nous attendons en fait un guitariste. Nous la ferons tourner en
juillet et nous verrons si ça marche.
Vous avez parlé du départ et du
retour de Nikos, votre alter ego. Ça s’est passé
comment ?
Nicholas : Il est parti en 94 car il avait créé
une société qui lui prenait beaucoup de temps. Il
est resté jusqu’à ce qu’on trouve un remplaçant.
Ensuite, il s’est mis en retrait mais en 97 il a composé
un morceau pour notre cassette et il participait un peu au mixage.
Il est venu nous dépanner en 99 quand notre batteur est parti,
le clavier s’est mis à la batterie et Nikos est revenu.
Quand tout a splité il est parti s’installer en Grèce.
A son retour, il a réintégré le groupe. Il
n’y a jamais eu de dissension musicale ou autre.
Votre groupe mise beaucoup sur Internet et fait
des e-single ce qui demeure une démarche encore assez rare
aujourd’hui.
Nicholas : Ça commence à venir, il
y a Tara King Theory, Dogma …
Quelle est la motivation pour ne pas garder un
morceau pour soi, pour un label ? Comment cette démarche
est-elle perçue ?
Nicholas : Dès le début du site,
j’ai toujours mis des morceaux MP3 en ligne. Mais je voulais
que les gens qui téléchargent aient un album entier
avec la pochette, le design pour la rondelle du CD. De plus, nous
finalisions l’album et nous voulions prendre la température.
Nous avons mis 2 morceaux extraits de l’album dans des versions
un peu alternatives plus 2 inédits dont la reprise et l’intro
du concert qui n’avait pas sa place sur l’album. La
troisième raison c’est que nous n’avions pas
accès aux radios, aux magazines et c’était le
seul moyen de toucher du monde et donc il fallait offrir quelque
chose. Je ne savais pas que d’autres le faisaient. En anglais
cela s’appelle les digital CD mais ils sont payants. C’est
aussi plus simple et de coût zéro pour démarcher
des concerts, des webradios, des webzines. Mais nous sommes un peu
piégés maintenant car quand on habitue les gens à
télécharger gratuitement il est difficile de transformer
l’essai pour qu’ils achètent l’album. C’est
plus difficile. Mais cela reste anecdotique par rapport à
ceux qui achètent l’album.
Comment vont les ventes ?
Nicholas : Cela fait deux semaines que c’est
en place et on en a vendu une bonne vingtaine. Donc c’est
pas mal. D’autant que nous avons eu des problèmes avec
les liens sur Atanata, le diffuseur. Nous allons faire de la pub
car c’est la première fois que nous faisons cela, nous
avons acheté un espace publicitaire dans un magazine Side
line. Un magazine belge en anglais qui est la référence
au niveau du public électro-new wave. On va voir le retour.
Il y a donc un investissement en argent.
Nicholas : Oui, c’est clair. Ne serait-ce
qu’au niveau du site. Avec les mises en ligne etc nous étions
au maximum de capacité du serveur et nous avons dû
investir 200 € dans un serveur privé. On l’a fait
pour six mois pour voir. Le concert du 2 avril nous a coûté
également puisque nous avons loué la salle. Mais j’ai
travaillé pendant plus de 10 ans dans une entreprise avec
un bon poste et j’ai pu négocier un bon licenciement
que j’ai réservé pour l’album et le site.
Nous avons actuellement un peu de rentrées suite au concert
et aux ventes de disques.
Vous en avez beaucoup en stock ?
Nicholas : Nous avons fait un premier pressage
de 250 copies chacun sur son graveur. Nous avons un contact pour
un pressage professionnel mais cela coûte plus cher. Pour
le moment nous attendons.
Pour le moment vous existez par votre site.
Nicholas : Oui mais nous essayons d’en sortir.
Nous avons eu une première chronique sur le magazine D-side,
on a Side line qui va sortir.
Dans une interview, vous avez dit : On ne peut
pas dire vouloir vivre de son art et refuser le système.
Nicholas : Ce qui m’énerve et me révolte,
et même en temps que spectateur parce que je me suis senti
insulté par ce groupe, c’est Noir Désir avec
"Sombre héros de l'amer". J’ai trouvé
insultant la façon qu’ils avaient de cracher sur la
ménagère de moins de 50 ans, sur la façon qu’ils
avaient d’accueillir leur public dans leurs concerts en leur
disant ceux qui sont venir pour entendre "Sombre héros
de l'amer" vous pouvez repartir. J’avais envie de leur
dire: "Petit con, sans "Sombre héros de l'amer"
et ceux qui l’ont acheté tu ne serais pas là
aujourd’hui !" Ça c’est le premier point.
Et puis je trouve tellement facile de dire ça
quand on a Universal derrière. C’est sûr qu'il
ne fait pas l’émission de Jean Pierre Foucault mais
son spot télé passe entre le JT et Jean Pierre Foucault
et c’est une attitude qu’ont beaucoup de groupes. Pourquoi
des émissions comme Champs Elysées ou Taratata ont
disparu ? Parce que les mecs ont pris la grosse tête et n’ont
plus voulu faire d’interviews, ni venir sur les plateaux.
Aujourd’hui même si je n’apprécie pas plus
que ça Star académy et cie, je me mets à la
place des maisons de disques qui se sont dit "Font chier ces
rocks stars et ces pop stars à la con ! On va formater nos
petites stars à nous, de bons petits soldats obéissants".
Et les mecs ont que leurs yeux pour pleurer.
Les anglais ont deux attitudes : quand ils sont
en studio, qu'ils composent ou sur scène, faut pas venir
les faire chier. Ensuite, quand la maison de disque a balancé
10 millions et bien il faut vendre. Si tous les groupes avaient
fait un peu plus d'efforts, l'oreille du public aurait été
différente. Et quand je vois l'attitude de certains médias
et de certains auditeurs par rapport à Indochine en les traitant
de vendus, on ne peut pas dire que c'est un groupe commercial après
les 10 ans qu'ils viennent de vivre, sur la route en faisant des
concerts, je suis content de voir un groupe un peu pervers pour
adolescent qui met un peu le bordel.
Quand j'étais enfant, il y avait de vraies
émissions de variétés où on voyait aussi
bien Serge Gainsbourg, Depeche mode que François Valéry.
Et c'est comme ça que la ménagère de moins
de 50 ans a bien aimé "sombre héros de l'amer"
et a acheté l'album. Je pars du principe que je m'en fous
de ce qu'écoute celui qui vient télécharger
sur notre site.
Que pensez-vous de la scène musicale française
actuelle? Je vous ai vu arriver avec un walkman.
Nicholas : J'écoutais le dernier Morrissey.
J'avais un peu décroché de la scène française.
Dans les années 90 et quand j'ai rencontré mon épouse
elle écoutait à fond Oui FM et elle m'a fait découvrir
Mickey 3D, Luke, Tarmac. Et j'ai découvert des groupes français
très créatifs et actifs. Nous ne chantons pas en anglais
par refus de la scène française. J'écoute Daho,
Gainsbourg... Je trouve qu'il y a eu un renouveau ces dernières
années grâce à Oui FM qui a soutenu les groupes.
En revanche, les labels sont beaucoup plus frileux.
Nicholas : Quand on voit le succès de Carla
Bruni elle a été signée par un label indépendant
car les majors n'y croyaient pas. Indochine est revenu avec un label
indépendant Double T qui a été racheté
par Columbia. Mon batteur qui s'occupe de la gestion de P18 le groupe
de l'ancien clavier de la Mano Negra et qui s'occupe d'un groupe
qui s'appelle Gwana Diffusion était près à
revendre sa structure mais quand il a vu ce qui se passait avec
les majors il a changé d'avis. J'espère que les indépendants
vont renaître et qu'ils ne vont pas retomber dans la doctrine
anti-système des années 80. Je me souviendrai toujours
de Ciel mon mardi où il y avait Boucherie prod, le label
des Bérurier noir qui ont cassé le système
et qui ont été rachetés par Virgin 3 jours
après sans mêmes s'en rendre compte. Indépendant
ne veut pas dire vendre 300 disques. C'est un état d'esprit.
Il y a également un problème avec
les distributeurs.
Nicholas : Quand on voit que Warner aux Etats Unis
ne veulent plus distribuer New Oder, Depêche Mode, Madonna
on se demande ce qu'ils cherchent.
En fait, ils cherchent une rentabilité
immédiate. Pour en revenir à l'album, la chanson "Above
the sky" ne ressemble pas tout à fait aux autres et
c'est celle sur laquelle vous comptez beaucoup et qui figure sur
le single. Pour quelle raison?
Nicholas : Quand je m'y suis remis j'étais
en vacances et il y avait le meilleur ami de ma femme qui est guitariste
et j'écoutais un morceau très entraînant du
deuxième album de Texas. Cela m'a donné en vie d'avoir
un morceau de ce style. En voilà l'origine. Et ça
a été un des premiers morceaux écrits que j'ai
envoyé à Stone Cold. Il a voulu conserver cet esprit
pur de la guitare et il a juste rajouté cette batterie qui
me fait penser à Tears for fears. Ce morceau est sur le single
tout simplement parce que c'est le premier qui était prêt.
Mais nous savions également qu'il s'agissait d'un morceau
qui avait un potentiel.
Il y a dans ce morceau une ambiance songwriter
qui diffère des autres morceaux. Est-ce l'amorce d'une nouvelle
évolution?
Nicholas : Cet album reflète bien la musique
que nous écoutons. Nous écoutons aussi bien Lukas
Bloom, un chanteur irlandais, Sting, du funk, que de l'électro
pure et dure ou des musiques expérimentales. Dans l'album
il y a deux choses : "Above the sky" dépouillé
et "Travelling man", de la pure techno électro
avec des synthés. Sans revenir constamment à Depeche
Mode, mais dans l'album Some great reward de 1984 dans lequel il
y avait "People are people", et au milieu il y a "Somebody"
piano-voix. Dans leurs albums toujours sur-produits, il y a toujours
en plein milieu 2 petits ovnis, acoustiques, dépouillés.
On retrouve cela aussi chez U2.
Il n'y a pas d'intérêt à écouter
onze fois le même morceau. Il faut surprendre l'auditeur.
Dans notre album il y a "Joy" qui est un peu déjanté,
un peu rock avec un gros break qui ralentit tout avec du piano et
des chœurs et puis qui repart. C'est représentatif de
ce que l'on veut faire et de ce que l'on aime aussi en tant qu'auditeur.
Vous restez donc très fan de musique ?
Nicholas : Oui. Je fais criser ma femme parce que
j'ai 2 000 Cd à la maison. J'écoute du matin au soir.
Le batteur est très latinos, il a joué avec la Mano
Negra, il fait des percus, il joue avec P 18. Nikos aussi est fan
de musique. Nous ne concevons pas la vie sans musique.
Comment se passe l'écriture des morceaux?
Nicholas : Généralement j'écris
tout sauf sur cet album où ma femme qui a du talent pour
écrire à partir de certaines de mes idées comme
pour "Above the sky". Nous avons co-écrit Travelling
Man. Mais elle a écrit aussi des morceaux seule comme "Waiting
for you". Sur les deux albums nous travaillions en groupe et
j'écrivais seul. Sur celui-ci que j'ai commencé seul,
j'ai eu envie de m'ouvrir aux autres. Sebastien de Hydargos a participé
à l'écriture, il a fait les guitares de "Resign".
Ma femme a écrit certains textes. Stone Cold s'est investi
dans la production et a écrit le morceau instrumental du
milieu. Cet album est riche de plusieurs univers.
Waiting for words d'ici un an, ce sera quoi dans
votre idéal ?
Nicholas : Je voudrais que le groupe soit signé
sur un label ou une major, même si humainement je préférerais
que ce soit un indépendant. Et puis vivre de la musique.
En tous cas, avoir la chance de toucher le public. Et que si on
se plante c'est parce que le public n'a pas aimé. Mais que
nous n'ayons ni regret ni remords à cause du système.
Si vous ne disposiez que de 3 mots pour qualifier
votre musique, quel serait votre choix?
Nicholas : Fragile, sincère et travaillée
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