Comédie de Eduardo de Filippo, mise en scène de Céline Bévierre et Alexis Bloch, avec Aurélie Barrin, Céline Bévierre (ou Clémence Brodin), Alexis Bloch, Brice Borg Jérémie Milsztein, Emmanuel Rehbinder, Christelle Schneider, Kamelya Stoeva et Benjamin Witt (ou Adrien Bourdet).
La jeune Compagnie Itinér(r)ances, composée de jeunes comédiens formés à l'Ecole Florent, s'est lancée un triple défi en choisissant de monter "Homme et galant homme", une partition du chef de troupe et dramaturge italien Eduardo de Filippo qui tient à la connotation socio-historique de ses pièces, à leur registre théâtral et à l'importance de la distribution.
En effet, il s'agit d'une comédie populaire napolitaine qui exalte la figure des petites gens, et plus spécifiquement en l'espèce celles des saltimbanques, mêle la farce héritée de la commedia dell'arte et le théâtre réaliste basé sur la réalité sociale italienne du début du 20ème siècle, avec notamment la satire de la bourgeoisie épinglée sous l'angle du vaudeville, tout en usant de la dualité du masque, celui de la comédie et celui du rôle social.
Et ce défi est relevé car la mise en scène bicéphale de Céline Bévierre et Alexis Bloch est particulièrement réussie en ce que, fidèle à l'esprit et au texte de l'auteur, elle permet un glissement progressif cohérent, et quasiment, sinon imperceptible, du moins naturel et évident, d'un registre à l'autre et insuffle un jeu appuyé mais sans excès d'effets.
Tout commence avec les prosaïques occupations et difficultés d'une troupe de comédiens nomades et de second ordre - le chef de troupe (Emmanuel Rehbinder), la jeune première enceinte jusqu'au yeux de ses oeuvres (Christelle Schneider), une comédienne (Céline Bévierre) et un souffleur bouché à l'émeri (Alexis Bloch) - engagé pour jouer dans une station balnéaire réputée par l'impresario Alberto De Stefano (Benjamin Witt).
Linge accroché aux fenêtres, frichtis dans la chambre d'hôtel, répétition laborieuse, au rythme de la farce populaire avec la volubilité méditerranéenne, succède le vaudeville quand De Stefano voulant épouser sa maîtresse enceinte (Aurélie Barrin) est confronté à un frère pyrofore (Ilias Dupuis) et à l'ahurissement de sa future belle-mère (Kameliya Stoeva) qui lui apprend qu'elle est déjà mariée avec un comte ombrageux (Jérémie Milsztein).
Pour sauver l'honneur de sa belle, il ne trouve que la solution de feindre la folie qui le mène au poste de police où sévit un impayable inspecteur Clouseau (Brice Borg). Une folie qui imprime son rythme au dénouement. Son sort sera-t-il de finir dans un asile psychiatrique ?
Sur la petite scène de l'Aktéon, les dix comédiens ont pris leurs marques et dispensent un spectacle choral mené tambour battant avec une fraîcheur bienvenue laissant toujours poindre le tragique sous le rire.
Dans le rôle titre, Benjamin Witt se taille la part du lion dans le rôle titre et son interprétation particulièrement démonstrative de la folie est étourdissante. Emmanuel Rehbinder campe avec conviction et efficacité le chef d'une troupe pas gâtée par la nature. Et les amateurs d'humour à froid seront sensibles au jeu irrésistible de Alexis Bloch et Brice Borg, tous deux imperturbables dans des rôles loufoques. |