Saint-Malo, j’aurai dû m’en douter. Pourtant, en lisant le titre, rien ne laissait présager que ce n’était que le début. Dans le métro, en bien plus grand que moi, une affiche disait : "Découvrez le premier volet de la saga de Marina Dédéyan". J’ai reconnu les trois mâts du bouquin que j’avais dans mon sac, j’ai fait le lien. Je devrai attendre pour connaître la suite de De tempête et d’espoir. Voilà donc pourquoi elle parle d’un voyage depuis le début et qu’elle n’est toujours pas partie aux deux tiers du livre.
Marina Dédéyan est bretonne et ça se voit, il n’y a qu’eux qui savent décrire cette sorte de péninsule livrée aux quatre vents, ces falaises déchiquetées par les lames salées qui prennent les marins, les maris, les frères, qui amènent des marchandises venues d’ailleurs, qui transportent des soldats et des croyants… Mais pas de femmes… Ou si peu.
Anne de Montfort a 17 ans en 1760, élevée dans un couvent, elle se destine depuis toujours à une vie monacale. Quand elle apprend qu’elle est orpheline, et sans nouvelles de son frère parti aux Indes, elle décide de prendre son destin en main. Avant de donner sa vie à Dieu, elle doit retrouver son frère, elle sent qu’il a besoin d’elle, de cette exceptionnelle complicité qui unissent des fratries, elle entend son appel du bout du monde.
Oui mais comment rejoindre les Indes quand les femmes portent malheur ? Quand la place d’une femme est celle d’épouse, de mère ou de nonne ? Avec un caractère déterminé et la complicité de sa cousine Apolline (morte d’ennui, mariée à un richissime armateur de Saint-Malo), Anne œuvre pour se faire embarquer sur le prochain navire en partance pour les Indes. Quelqu’en soit le prix, elle retrouvera son frère, quitte à embarquer clandestinement s’il le faut. Jean-Baptiste Porée, un vieux veuf un peu dégueu lui fait une offre qu’elle ne refuse pas, toute déterminée qu’elle est dans son projet. Mais je ne vous en dis pas plus.
Pendant la lecture, je me suis souvent demandée quand l’histoire, entrecoupée de pages de journal intime d’Anne, allait enfin décoller. Non pas que l’écriture soit lourde ou les tournures redondantes (quoique le vocabulaire du bateau n’est pas mon jouet préféré), mais parce que le projet est annoncé tellement tôt et prend forme tellement lentement, que j’ai parfois eu l’envie d’abandonner. Comme Anne de Montfort.
Et ce que j’ai pris pour une faiblesse d’écriture est en réalité une véritable prouesse d’écriture. Après s’être attaché à l’intrépide Anne, le lecteur vit à travers ses yeux, à travers ses pensées. La lenteur des démarches, les envies d’abandonner, le temps qui passe et l’attente entre la décision et l’œuvre, c’est tout ça que Marina Dédéyan réussit à nous transmettre dans son écriture.
Cette première partie de passe à Saint-Malo, la suite à Pondichéry. To be followed… |