C'est un peu effrayant cette réunion de vieux milliardaires de la musique américaine.
On les imagine à la party de sortie du cd, dans une villa dorée de L.A. ; tout le monde est bourré, tu reprendras bien un martini ? Non coco, je suis A.A. , la coke dans les chiottes sur le rebord en marbre du lavabo, la piscine, les starlettes, ma chérie, ton lifting, for-mi-da-ble, est-ce que tout le monde me reconnait, je suis connu moi aussi.
On se sent mal à l'aise comme dans une série télé ricaine. C'est laid, malséant ; Don Henley (oui, des Eagles) est là et minaude "Searching for a Heart", Steve Earle , Jackson Brown, Bonnie Raitt, tout ce beau monde est superbe dans des robes moulantes à paillettes, des bottes de cow-boy, avec des brushings et des permanentes, et ca fait la roue et ca célèbre le talent de notre cheeeeeeer ami, Waron Zevon, quelle tragédie, c'est vraiment trop triste, on l'adorait tellement.
Ce n'est pas si laid cet album, c'est juste déprimant. Tout y est si terriblement prévisible, propre, nickel. Y'a rien qui dépasse. Et rien n'est plus éloigné du sarcasme des chansons de Zevon.
On va l'acheter de toute façon puisqu'il y a Springsteen (une reprise live plutôt belle de "My Ride's Here", avec des violons pébourds et de l'accordéon – on dirait les Pogues...) et Dylan (un atroce "Mutineer"). Et Ry Cooder qui retrouve David Lindley. Adam Sandler s'en sort plutôt mieux que le reste avec "Werewolves of London" (on est quand même loin de la classe des Groovies) ; Pete Yorn, avec "Splendid Isolation", fait presque du – on ose à peine prononcer le mot dans une si belle compagnie – Rock...
Le plus drôle, c'est de penser à tous les jeunes rockers qui vont devoir acheter cette indigeste pièce montée californienne pour le morceau des Pixies : "Ain't That Pretty At All"... Qu'est-ce que ces jeunes rigolos font ici ? Qui les a invités ? On n'est pas du même monde ! Ah les sales gosses qui gachent une si belle soirée !
Avant de mourir, Warren Zevon qui, lui, savait s'amuser, avait écrit " My Shit's Fucked Up". C'est bizarre, aucun des invités de la party n'a décidé de la reprendre celle-là... C'est qu'on sait se tenir. |