Solo clownesque écrit et interprété par Meriem Menant.
Un canapé. Noir. Lumière. "Emma la clown", à l'apparence singulière de cheftaine scout montée en graine avec une tête de poupée de chiffon affublée d'un nez rouge, entre sur scène en disant, d'une voix de crécelle, "J'ai envie de mourir" qui frappe en plein cœur.
Alors bien sûr elle se moque de la "sychanalyse" comme elle l'appelle, de la figure du psychanalyste, de la thérapie de groupe et du patient lui-même face à ses peurs et son indécision mais le plus important est ce personnage d'Emma "la", et non pas "le", clown qui est investie d'une vie propre avec ses problèmes ses obsessions, et en l'occurrence ses névroses, avec toute l'ambiguïté et la poésie attachée au médium du clown, ce qui entraîne un empilement de masques.
Encore que s'agit-il d'un personnage ? Emma ne fait pas le clown, elle est clown. Point. Tout simplement pourrait-on dire. Depuis plusieurs années, elle entraîne le spectateur à la découverte de son univers qui, aujourd'hui avec le cocasse et décalé "Sous le divan", et pas "sur", passe par celui de son univers mental.
Car Emma la clown, "l'invivante" comme elle se ressent, affirme ne pas avoir d'inconscient, ne pas rêver et pourtant elle est névrosée, angoissée et curieuse. Et c'est la raison pour laquelle elle voudrait savoir ce qui se passe dans la tête des autres. Pour savoir si elle est comme tout le monde.
Car Emma la clown se situe quelque part entre la Gelsomina de "La strada" de Fellini, le clown Buffo créé par le psychologue clinicien Howard Butten et le personnage de Yolande Moreau dans "Sale affaire, de sexe et de sang". Elle n'a pas sa langue dans sa poche et est aussi musicienne et chanteuse, elle a une bien belle voix, pour jouer de la flûte, pousser la chansonnette italienne ou chanter sur le "Boléro" de Ravel rythmé avec deux aiguilles à tricoter.
Le spectacle de Meriem Menant, comédienne ébouriffante, est toujours sur le fil du rasoir, entre le tragique et le rire, le burlesque et la poésie, l'absurde et le cathartique avec un savant dosage alchimique qui fascine le public. Elle promène sur l'humanité et l'altérité le regard écarquillé d'Emma la clown ...et elle rêve... de courir dans les prés. |