Comme un air de famille…
"Oh why here into the fen with just sad fields to see […] I don’t feel any fears ?" ("Homeland")
Pale Grey sort en France son premier LP dont l’enregistrement avait commencé début 2012. La formation d’origine belge est composée de Gilles Dewalque, Maxime Lhussier, Janjannes Montens et Benoît Damoiseau. Best Friends (label JauneOrange) est un album qui nous donne l’impression de l’avoir déjà entendu quelque part, à un moment imprécis que notre mémoire insoumise refuse de récupérer.
En écoutant les chansons pour la première fois, nous sentons que nous connaissons d’avance la mélodie ou la voix. Elles nous rappellent de vagues souvenirs, des paroles et des rythmes connus mais que nous n’arrivons pas à identifier. Tel un air de famille, le rapprochement exact est difficile à établir. Les mots justes nous manquent, l’expression pertinente nous échappe et les images ne veulent pas venir.
La sensation globale est celle d’un indie pop rock relativement classique. La voix du chanteur principal est semblable à celle de Metronomy à la différence d’un ton plus grave. Les rythmes un peu rétro sont aussi ceux de "Margot" de Minks. La boîte à rythme et les synthés, ces incontournables du genre, s’apparentent à ceux de "Tessellate" d’Alt-J. Et, pour approfondir ce sentiment de "déjà-entendu", la simplicité du pop semble y régner. Le groupe en emprunte les paroles et les rythmes où les répétitions et les structures en boucle abondent. Les premières chansons sont composées en un anglais relativement simple et les rimes sont parfois un peu sommaires comme dans "Bottle" : "blind" - "find" - "mind". Les mots clefs des chansons pop comme "light", "friend", "hope" et compagnie sont bien sûr présents. Bref, des thématiques assez générales.
Or, sous cette apparence de nonchalance se cache la véritable originalité du groupe. La légèreté est accrocheuse. Les paroles s’enchaînent avec désinvolture, le rythme sautillant imite la fraîcheur de leur musique. Le deuxième morceau, "Seaside" en est la preuve : "Seaside, I drive my bicycle in the sun light" ("Bord de la mer, je fais du vélo dans la lumière du soleil"). Comment ne pas avoir cette cadence dans la tête pendant le reste de la journée ? Malgré cette ambiance d’insouciance, des touches plus graves viennent se dessiner pour former un ensemble plus nuancé. Les paroles n’ont pas toujours un optimisme rayonnant. Dans "Wolf", nous pouvons par exemple entendre "Faith evaporates to reveal your faults" ("L’espoir s’évapore pour révéler tes fautes").
La tracklist, elle aussi, progresse vers un son de plus en plus personnel. Le caractère plus électronique de la première chanson "Deadline" s’efface au profit de la guitare électrique dans "Homeland". Au collage d’influences s’unissent les teintes personnelles du groupe, difficile alors de parler de platitude. Leur son est un point de convergence où naît la singularité qui s’impose au fur et à mesure que nous réécoutons l’album. L’album Best Friends de Pale Grey surgit comme un déjà-vu qui paradoxalement se révèle être inédit. |