Au Théâtre Essaion se joue "Mes nuits sont plus belles que vos jours" mis en scène par Anne Pascale Paris qui propose sur le thème de la passion amoureuse, déclinée par la romancière Raphaelle Billetdoux, un très beau et très grand moment de théâtre vivant.
Elle s'est entourée de deux comédiens lyonnais, Nathalie Follezou et Ivan Gouillon, qui sont tout simplement excellents que nous avons eu le plaisir de rencontrer.
Parlez-nous un peu de vous.
Ivan Gouillon : C'est mon métier depuis 8 ans. J'arrive à en vivre à peu près J'y suis arrivé par l'improvisation. J'avais fait du théâtre en amateur pendant longtemps mais j'étais au départ plutôt attiré par la musique jusqu'au jour où je me suis aperçu que j'ai mis la musique comme plaisir mais pas pour en faire mon métier. Et puis on faisait souvent appel à moi pour jouer mais pas comme musicien. A 25 ans, il y a eu un déclic et j'ai suivi des cours privés car je n'avais pas envie de me retrouver dans un cursus scolaire. A cette époque j'ai commencé à faire de l'improvisation en amateur, puis très vite en professionnel.
Toujours dans la région lyonnaise dont vous êtes originaire ?
Ivan Gouillon : Oui. Mais avec la Ligue d'improvisation lyonnaise on bouge pas mal.
Vous appartenez à Compagnie Sol y Sombra qui réalise ce spectacle ?
Ivan Gouillon : Sur ce spectacle, je travaille avec cette compagnie mais je ne me sen spas appartenir à une compagnie plus qu'une autre.
Avez-vous une actualité sur Lyon ?
Ivan Gouillon : J'ai une petite actualité car nous avons repris un spectacle que nous avion monté l'année dernière, juste après la création de Mes nuits sont plus belles que vos jours, qui s'appelle "Non si paga" de Dario Fo. Nous jouons à la Bourse du Travail et que nous jouerons également dans la région lyonnaise. Et toujours la Ligue d'improvisation lyonnaise toutes le semaines sur la péniche La marquise sur les quais de Rhône.
Nathalie Follezou : J'ai également suivi des cours privés. J'ai tenté sans succès des concours d'entrée dans de grandes écoles et je suis restée à Lyon au cours du Théâtre de l'Iris à Villeurbanne. Je me sis formée dans d'autres cours, j'ai fait plusieurs stages AFDAS. J'ai commencé à travailler au Théâtre de l'Iris. Ensuite j'ai travaillé avec différentes compagnies en faisant des spectacles pour jeune public, du théâtre contemporain, et je me forme au chant depuis quelques années. Une part assez importante de mon activité est consacrée à l'animation de stages pour enfants. Et je ne fais pas partie non plus de la Compagnie Sol y Sombra même si nous pouvons être amenés à travailler ensemble.
Comment êtes-vous arrivés sur ce projet ?
Nathalie Follezou : Anne Pascale Paris nous avait repérés individuellement sur d'autres spectacles et quand elle a travaillé sur ce spectacle, le souvenir qu'elle conservait de nous semblait bien correspondre à l'énergie des personnages. Elle nous a donc proposé de participer à cette aventure.
Concrètement, comment cela s'est-il passé car Anne Pascale Paris a beaucoup investi en énergie et en temps sur ce spectacle puisqu'elle a fait l'adaptation du roman de Raphaelle Billetdoux et en a fait la mis en scène ?
Ivan Gouillon : Je connaissais très peu le texte. Je n'en connaissais que le thème et je n'ai toujours pas lu intégralement le roman. En réalité, j'ai totalement suivi Anne Pascale Paris car c'est une rencontre de feeling et de confiance. Et ce qui m'a beaucoup intéressé c'est ce qu'elle nous a proposé au niveau du travail. Ca j'ai une approche très physique du travail. Je n'aime pas avoir une première approche intellectuelle ou cérébrale, j'aime bien partir de la forme et du physique pour arriver au fond. Donc sa proposition me convenait parfaitement mais je ne savais pas où j'allais. La confiance plus la curiosité m'ont guidé et je m'y suis vraiment retrouvé.
Nathalie Follezou : La volonté, la motivation et tout le travail préalable d'Anne Pascale Paris ont été déterminants pour moi car je n'avais pas du tout aimé le livre que je trouvais trop sombre, trop fataliste. La détermination d'Anne Pascale et ce qu'elle dégageait donnaient envie de la suivre pour partager cette aventure. Je n'ai pas regretté bien sûr puisqu'ensuite j'ai eu un regard différent sur le livre en y trouvant un humour qui ne m'était pas apparu à la lecture et qui s'est révélé lors du travail et notamment lors du travail d'improvisation par lequel nous avons commencé. Par le son également car la bande son est très importante et qui nous a nourri au niveau du jeu.
Le travail de répétition a-t-il été long et quand ont eu lieu les premières représentations ?
Ivan Gouillon : Nous avons travaillé sur une période de 3 mois Le premier mois nous avons énormément travaillé sur le corps, sur le physique, sur la restitution des sentiments ou des sensations des personnages par le physique. Ensuite, pendant un mois, nous avons travaillé uniquement tous les 2. Le 3 ème mois nous avons fait la synthèse en ayant la structure qui nous a permis de balayer des choses, de trouver des choses nouvelles.
Nathalie Follezou : Alors que les deux premiers mois se sont déroulés dans un état de recherche, le 3 ème mois s'inscrivait dans un optique de spectacle avec des échéances.
Ivan Gouillon : Les premières représentations ont eu lieu en février 2004 au Théâtre des Marronniers à Lyon. Nous avons joué à guichet fermé pendant 3 semaines.
Nathalie Follezou : Nous avons joué en plein air ce qui était une expérience très intéressante.
Ivan Gouillon : Ce qui nous a donné beaucoup d'ampleur dans les mouvements et dans la voix ce qui a été très enrichissant pour nous.
Nathalie Follezou : En novembre, nous avons joué au Théâtre de l'Iris à Villeurbanne.
Vous avez abordé le travail du corps et il est vrai qu'il s'agit d'un spectacle très physique qui doit vous demander une énergie et une concentration considérables.
Ivan Gouillon : Ça demande effectivement énormément d'énergie mais je pense que cela en demande moins que si nous avions eu une approche très intellectuelle et intérieure. S'il en avait été ainsi, je pense que nous ne tiendrions pas la moitié du spectacle. La première approche physique demande de l'énergie mais il en résulte de la bonne fatigue. C'est aussi ce qui nous permet de sortir indemnes de ce spectacle. La forme nous amène le fond et non l'inverse. C'est éprouvant parce que c'est du sport entre guillemet mais cela nous prend moins d'énergie quand même. Et je pense que les choses passent de la même façon, et peut être même de façon plus forte. Et si nous n'avions pas cette forme-là et ce rythme, cela pourrait être ennuyeux.
Nathalie Follezou : Oui, je suis tout à fait d'accord. Ce travail me convient parce qu'il nous permet de chercher des choses dans le domaine du concret, d'autant plus que nous sommes que 2 pendant près d'une heure et demie avec une présence constante sur scène. On sent bien si réussit à emmener le spectateur ou pas. C'est un beau challenge chaque soir.
La programmation sur Paris touche à sa fin. Y a-t-il des projets de reprise ?
Nathalie Follezou : Pas pour le moment mais nous espérons que le spectacle aura une 4ème vie d'autant que les retours sur Paris sont plutôt bons pour la plupart.
En attendant une éventuelle reprise, avez-vous d'autres projets ?
Ivan Gouillon : Pour la Quinzaine des auteurs à Nantes, je vais me remettre à la création d'une des dernières pièces d'Israel Horowitz qui s'appelle "Péché maternel" avec le Théâtre du Sphinx avec un mise En scène de Patrice Fourreau . Nous commencerons les répétitions à Lyon puis nous irons à Nantes. Nous jouerons ensuite du 4 au 14 mai à Lyon et ensuite, il y a de fortes chances pour que nous venions en septembre-octobre 2005 à Paris.
Nathalie Follezou : Je vais jouer dans "Schweig" de Brecht, une pièce chantée que nous jouerons en avril dans la banlieue lyonnaise au Centre Culturel de Meyzieux.
Vous sentez-vous proches des personnages que vous incarnez et existe-t-il une interaction entre le personnage et vous ?
Nathalie Follezou : Pour moi, dans l'absolu, ce sont deux choses différentes. Le personnage est une création à part entière. Certains soirs, peut être par manque de concentration, il peut y avoir une interaction. Mais c'est évident parce que nous avons nourri ces personnages de nos références. Mais dans l'absolu non.
Ivan Gouillon : Pour avoir connu des histoires passionnelles, oui, bien sûr je me reconnais là-dedans, d'une certaine manière. Dans le spectacle, on est dans l'extrême mais comment ne pas me reconnaître ? Tout ce cheminement, j'ai l'impression de le connaître à plus petite échelle. C'est d'autant plus troublant. Ça me parle. Je sais ce que c'est d'être jaloux pour des vétilles, de sentir que l'on est odieux et complètement ridicule, de le savoir. Nous avons tous un peu de Blanche et de Lucas qui se cache en nous et que confrontés à un certain contexte ou à une autre personne cette chose peut resurgir. Donc cela veut dire vigilance. La bestiole est tapie et il faut faire attention de ne pas la laisser sortir. Mais oui, je me suis vu dans ces situations.
Nathalie Follezou : Moi également mais pas forcément dans le personnage de Blanche. Finalement, je me reconnaissais plus dans le personnage de Lucas.
Ivan Gouillon : Je n me retrouve pas dans le personnage de Blanche. Je trouve qu'il y a quelque chose de plus romancé dans le personnage de Blanche alors que le personnage de Lucas est juste, même s'il est excessif.
Vous sentez-vous proche du théâtre vivant, celui qui veut montrer l'homme à l'homme ?
Ivan Gouillon : Je me sens proche de plein de formes théâtrales et je n'ai pas le sentiment d'appartenir à une forme plus qu'une autre et j'aime bien changer de registre. Par exemple, la pièce de Dario Fo dont je parlais est un texte très militant mais écrit comme une farce avec les mêmes ressorts qu'un vaudeville qui finit presque comme du théâtre de l'absurde, ce qui en fait sa richesse. Il y a à piller partout !
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