Réalisé par Sebastian Lelio. Etats Unis. Romance. 1h44 (Sortie le 1er mai 2019). Avec Julianne Moore, John Turturro, Caren Pistorius, Michael Cera, Brad Garrett, Holland Taylor, Jeanne Tripplehorn et Rita Wilson.
Avec "Gloria Bell" de Sebastian Lelio, Julianne Moore fait une entrée tonitruante dans la cinquantaine rayonnante.
On se doutait qu'elle allait bien se sortir de ce passage obligé, celui où une actrice américaine très active depuis une vingtaine d'années, ne peut plus cacher qu'elle est plus près de la retraite que de l'année du Bac.
En général, cela se traduit par un film "sirkien", où la femme abandonnée par son mari, quittée par ses grands enfants, délaissée par des amies qui ont les mêmes problèmes qu'elle, essaie de se consoler avec un homme plus jeune qu'elle (et de classe inférieure)... et voit tout le monde lui reprocher cette mésalliance et ce soudain appétit inconvenant d'amour physique...
Dans un film de Sirk, la femme mûre se résigne à la télévision que ses enfants lui achètent comme viatique. Dans "Gloria Bell" de Sebastin Lelio, les choses sont bien différentes. Dans ce qui constitue un remake de son film chilien au même titre ("Gloria, 2013), la femme qui renaît à l'amour en est à son premier coup d'essai et l'on imagine que l'expérience John Turturro ne sera pas la dernière.
Pourtant, l'irruption du beau quinqua brun barbu avait tout pour être une solution pérenne. Il faudra voir le film pour comprendre l'hilarante raison pour laquelle Turturro n'était pas - et de loin - le prince charmant qu'il semblait être.
Complètement investie dans le rôle, Julianne Moore n'a jamais été aussi star et aussi crédible. Par moments, avec ses lunettes, elle a quelque chose de Diane Keaton, même si elle n'ira pas jusqu'à rechercher "Mr Goodbar".
Elle est constamment en train de regarder son entourage, d'observer l'autre et les autres et cette distance, qui n'implique cependant pas qu'elle se préserve des hauts et des bas de son âme affligée, la maintient à flot dans l'humour et l'auto-analyse lucide.
Son histoire avec John Turturro vaut largement des duos hollywoodiens du passé et l'on ne les oubliera pas en train de se chercher, de se trouver et de se rater.
Une fois encore, Sebastian Lelio est capable de suggérer beaucoup sans en montrer trop. Le réalisateur chilien d' "Une femme fantastique" est vraiment en train de devenir un metteur en scène hollywoodien "classique". Jamais académique, il retrouve les accents des grandes comédies comme savaient les construire Cukor, Mc Carey ou Hawks.
On lui prédit, ainsi qu'à sa comédienne, une décennie heureuse et l'on ne serait pas étonné que le couple se reforme bientôt. On notera aussi que dans le rôle de Peter, le fils de Gloria, on retrouver Michael Cerra, sortant timidement des comédies collégiennes où il s'est attardé.
"Gloria Bell" de Sebastian Lelio est ce que le cinéma majoritaire américain a fourni de mieux depuis le début de l'année. |