Picasso était une force de la nature. Il aimait les femmes et la tauromachie. Le sexe nourrit sa peinture.
Enfant, il assiste aux corridas avec son père et collectionne les cartes postales brodées représentant toréadors et jeunes gitanes andalouses. Adolescent, il fréquente les bordels.
Dès lors il était impossible qu'il ne croise pas Carmen, la mythique héroïne de Prosper Mérimée et Georges Bizet, symbole de passion, de trahison et de mort, cristallisation des pulsions de vie et de mort, dont le meurtre se consomme sur fond de mise à mort du taureau dans l'arène. Dès 1898, il peint une jeune Carmen.
Le Musée National Picasso propose, sous l’impulsion de sa directrice Anne Baldassari, une exposition foisonnante à l’image du génie créateur du peintre autour d’une thématique récurrente dans son œuvre sous le titre "Picasso - Carmen , Sol y sombra".
Dans les salles claires de l'Hotel Salé, sont présentés de nombreuses peintures, dessins, gravures, photographies et documents.
Dont, notamment, et pour la première fois à Paris, quelques uns des grands tableaux peints par l’artiste dans les années 1904-1918 dont "La célestine".
Carmen, icône de la féminité représente toutes les femmes et Picasso représentera toutes les femmes sous le masque de Carmen.
L'exposition s'ouvre sur cette galerie de portraits féminins, en pittoresque costume espagnol, traités à la manière des maîtres.
Picasso ne se lassera pas de peindre les femmes aimées avec les attributs de Carmen.
Mais comme les histoires d’amour finissent mal en général, la femme lumineuse se transforme en harpie. Sol y sombra.
Dans sa période surréaliste, Picasso s’empare de la figure du minotaure, comme représentation de l’animalité à partir de laquelle l’homme prend son essor, qui constitue une variante antique du taureau.
La transposition dans cette "minotauraomachie" s'impose face à la symétrie du sacrifice du taureau, symbole de l'animal sauvage et du meurtre de Carmen, représentation de la femme.
L'étreinte puissante de "Figures au bord de la mer" préfigure ce qu'elle deviendra quand la tauromachie érotique et sexuelle tourne au combat à mort.
Entre 1923 et 1935, les différentes oeuvres réunies permettent d'apprécier l'évolution du traitement de cette thématique en fonction des périodes de la vie intime de Picasso.
Dans les premières, le minotaure ardent et violent, consomme le viol de manière atroce et insatiable.
Ensuite, viennent les combats sanglants entre le cheval, représentant la femme, et le taureau qui ne s’achèvent que par la mort du sexe faible jusqu’au renversement des rôles avant que le minotaure soit sous dépendance, l’humanité va dominant l’animalité.
Puis, Carmen deviendra l'incarnation de la peinture et c'est avec elle que le peintre va en découdre.
Picasso écrivait en 1963 dans un carnet exposé : "La peinture est plus forte que moi, elle me fait faire ce qu'elle veut." |