Voilà bien une exposition inattendue et proposée, de surcroît, par un médiateur culturel inhabituel que ce "Chiotissime !" organisé par le Service public d'assainissement francilien qui s'installe en plein air sur le trottoir du boulevard de la Bastille.
En effet, le SIAAP propose un tour du monde en images des toilettes avec des photographies grand format montrant des toilettes de 31 pays, et à des époques différentes, les plus anciennes étant celles des incontournables Willy Ronis et Robert Doisneau réalisées dans les années 50.
Ce service chargé de l'amélioration de la qualité des eaux de la Seine et de la Marne et de la préservation de la biodiversité entend ainsi appeler l'attention non seulement sur les règles d'hygiène mais également sur les enjeux du traitement des eaux usées
Voyage autour du cabinet d'aisance
L'exposition présente un florilège de 46 photographies qui ressortissent à tous les registres.
Flash back dans le Paris des années 50 avec un personnage désormais légendaire, la dame pipi du métro immortalisée par Willy Ronis ou les toilettes de l'ancien marché des Halles, dans le ventre de Paris, installées parmi les étals et saisies par l'objectif de robert Doisneau.
Dans les sociétés occidentales, le cabinet d'aisance pièce à vivre, comme l'élégant cabinet d'une riche demeure milanaise photographié par Ferdinando Scianna, contraste violemment avec les toilettes carcérales en open space.
De même avec les installations sommaires dans les pays défavorisés elles sont réduites à l'essentiel comme dans les camps de réfugiés pour lesquels elles constituent une priorité, ou
dans les camps des nomades roumains.
Au rayon du mauvais goût ostentatoire, l'Asie fortunée monte sur la plus haute marche du podium avec
les toilettes en or 24 carats sur lesquelles trône un commerçant hongkongais talonné par un restaurant taiwanais
décoré sur le thème des toilettes.
Et les toilettes s'adaptent à tous les environnements : spartiates au Groenland, ambulantes en Chine, flottantes au Vietnam, suspendues en Indonésie, dérisoires à l'air libre le long du Gange ou, placées sous la protection du Christ, ultimes rescapées d'une église dévastée en Angola.
La photo documentaire, dont certaines sont intrigantes comme
les toilettes tout confort perdues dans le Sahara dues à
Rainer Drexel, cotoie la photo plasticienne de Thierry Pasquet avec
le geste écologique.
Par ailleurs, dans l'héritage de l'oeuvre de Duchamp avec l'urinoir rebaptisé "Fontaine" considéré comme avoir scellé la naissance de l'art moderne, certains artistes
utilisent le siège de WC telle l'artiste libanaise Nada Sehnaoui avec une installation de 600 sièges posés comme des pierres tombales pour commémorer le début de la guerre civile dans son pays.
Dans un autre registre les désigners customisent le sanitaire à l'instar de cette foire ukrainienne dont le cliché a été retenu pour l'affiche de l'exposition.
Enfin, se taillent un beau succès les photographies placées sous le signe de l'humour. L'humour national, pour lesquels les pays du Nord sont les champions, comme
la Belgique avec des toilettes de chantier en rose bonbon disposant de papier bleu ou l'Islande
qui a apposé au fond des urinoirs le portrait des banquiers responsables de la crise financière.
Mais également celui de clichés inattendus comme celui de David Gray surprenant le prince Charles d'Angleterre sortant de modestes toilettes australiennes en nettoyant ... ses lunettes. |