Pour la saison 2010-2011, le Musée des Arts Décoratifs avait proposé au visisteur de redécouvrir les salles dédiées aux collections permanentes à la faveur de l'exposition "Circuit Céramique - La scène contemporaine française" qui y était déployée.
En 2013-2014, il réitère cette monstration en résonance avec "Dans la ligne de mire - Scènes du bijou contemporain en France" consacrée à la création actuelle dans le domaine du bijou.
Le commissariat
est, une nouvelle fois, assuré par Frédéric Bodet, conservateur à la Cité de la Céramique à Sèvres, qui procède avec toujours autant de discernement pour élaborer une déambulation éclairée qui a pour fil rouge, ou plutôt rose fluorescent choisi pour la signalétique par Les designers anonymes qui signent la scénographie, le bijou érigé en objet d'art conceptuel.
Dans la ligne de mire : pleins feux sur l'art du bijou Le propos de l'exposition est de présenter un large panorama de la création contemporaine qui oeuvre pour faire sortir le bijou du pré carré de l'accessoire de mode à unique fonction de parure esthétique et d'ornement décoratif et ambitionne d'exporter dans le champ des beaux-arts la création de bijoux, considérée comme un métier d'art, cantonnée dans celui arts appliqués.
Cette démarche vise essentiellement à renouer avec la signification primitive et polysémique du bijou qui syncrétisait souvent le profane et le sacré, l'intime et l'identitaire, l'insigne et l'appartenance.
Ces créateurs élaborent leur vocabulaire personnel en puisant dans les références historiques et symboliques du bijou ce qui a inspiré le commissaire pour l'insertion par résonance "stylistique" dans les vitrines des collections permanentes ordonnées de manière chronologique du Moyen-Age à l'époque contemporaine.
Ainsi, par exemple, pour les bijoux en fer forgé ou mailles métalliques de Sophie Hanagarth sises dans le département du Moyen-Age, ou les bagues strassées kitsch de Maud Traon en regard des porcelaines Rococo.
Dans le département contemporain, c'est la tendance du bijou-sculpture qui s'impose avec des créations souvent spectaculaires en taille.
Comme les volumineux colliers "Naissance" de Florence Lehmann symbolisant l'anneau pelvien.
L'exercice est particulièrement réussi et la déambulation placée sous le signe d'une chasse au trésor permet au visiteur d'aborder d'une manière différente l'histoire des arts décoratifs.
D'autres créations font l'objet d'une présentation scénarisée notamment dans les "period rooms". Tel est le cas de l'appartement de de Jeanne Lanvin reconstitué dans le département Art déco qui a été confié au directeur artistique de la Maison Lanvin.
Sous le titre à double sens de "Les Ravisseuses", Alber Elbaz a élaboré une mis en scène de film noir pour présenter les bijoux luxuriants créés par son collaborateur qui a été formé chez Yves Saint Laurent auprès de Loulou de la Falaise, le designer Elie Top .
Ce qui correspond à la deuxième ligne de force de l'exposition qui est de proposer un focus sur le renouvellement des codes de la bijouterie engagé par certaines maisons de la mode ou de la joaillerie.
Enfin, évoquant un enfer bibliothécaire, la Galerie d’Actualité du département contemporain, dotée d'une scénographie carcérale, est consacrée aux créations "dark side".
Regroupées sous le titre "Bijoux de parade / Bijoux de combat", elles s'inspirent des univers singuliers, longtemps considérés comme sulfureux, du fétichisme, du sado-masochisme et du body art dont les codes sont déclinés, et parfois, détournés, de manière polysémique.
La réflexion des créateurs se présente souvent comme une quête autour du sens originel et primitif du bijou qui, de la parure au trophée, était investi d'une signification sociétale et sacrée mais également guerrière.
Et le visiteur ne sait où donner du regard entre les parures de tête à l'esthétisme glam rock futuriste de Erik Haley, les masques en cuir du duo Mouton-Collet et les "suppléments corporels" de Bejnamin Lignel telles ses broches-organes.
Et du corps chosifié avec le bijou "exosquelette" de Patrick Veillet déclinaison bijoutière de la pratique de l'implant dans l'art corporel à l'excentricité égocentrique flattée par les bijoux vecteurs des désirs liés aux péchés capitaux de Emmanuel Lacoste, les propositions sont tout aussi inattendues que spectaculaires.
A noter que cette exposition constitue l'événement majeur des "Circuits Bijoux" organisés par les Ateliers d’art de France qui rassemblent plusieurs dizaines d'expositions à Paris de septembre 2013 à mars 2014 associant tous les acteurs culturels et institutionnels pour soutenir et médiatiser la création contemporaine du bijou. .. |