Conte adapté par Joël Jouanneau du roman éponyme de Tarjei Vesaas, mise en scène de Stéphanie Loïk, avec France Darry, Daniela Labbé Cabrera et les danseuses sur quadrisse Pauline Barboux et Jeanne Ragu.
Dans le cadre d'un travail interdisciplinaire en collaboration avec l'Académie Fratellini croisant le théâtre et les arts circassiens, Stéphanie Loïk a conçu deux spectacles en diptyque sur la thématique de l'amour naissant et de la séparation autour de l'oeuvre du romancier norvégien Tarjeï Vesaas.
Concomitamment à "Les Ponts" qui traite l'amour hétérosexuel de deux adolescents, "Palais de glace" aborde l'amitié amoureuse fulgurante et intense de deux petites filles qui va s'inscrire de manière singulière tant dans l'éphéméréité que dans l'éternité du fait de la disparition inexpliquée de l'une d'elles qui aurait été ou se serait engloutie dans le palais de glace formé par la glaciation hivernale d'une cascade.
A l'intrigue aussi claire qu'elliptique et à l'écriture minimaliste de l'auteur, qui satisfait à la réputation notoire d'économie textuelle de la littérature scandinave, et en appelle au ressenti émotionnel plus qu'à la raison matérialiste, correspond une mise en scène épurée à l'extrême.
Par ailleurs, Stéphanie Loïk procède à transposition scénique en double miroir dans laquelle la relation fusionnelle et passionnelle des fillettes, qui est au coeur du récit et en constitue son prologue événementiel, est évoquée charnellement par deux danseuses sur quadrisse et rapportée comme un écho du passé en voix-off par des bribes de dialogues entre les enfants.
Le récit qui entrelace les espaces temporels et imbrique réalité et souvenir, dont l'adaptation française due à la plume inspirée de Joël Jouanneau rend parfaitement compte de sa dimension symbolique et onirique bien soutenue de surcroît par les lumières de Gérard Gillot, est dispensé par deux comédiennes.
France Darry est la tante de la fillette disparue, figure du monde des adultes, soumis à la rationnalité d'explications rationnelles, et Daniela Labbé Cabrera la jeune fille qui ne peut oublier cet amour absolu. Toutes deux réussissent une vraie performance.
Au quadrisse constitué de quatre cordes suspendues, Pauline Barboux et Jeanne Ragu, formées à la danse avant de s'orienter vers la danse-voltige en intégrant l'Académie Fratellini, procèdent à une autre forme de narration dans laquelle le corps remplace les mots.
Ce saisissant pas de deux aérien, qui relate à merveille la fusion charnelle des corps amoureux qui sont hors de la réalité et de la pesanteur du monde, participe à l'harmonie qui préside à ce spectacle qui constitue un singulier moment de grâce. |