Ah, l’élégance des cordes à la française. Angel Fall dompte les tympans des adeptes des voyages collectifs sans illicite depuis 2003. Damned, tout ce temps. Ils passèrent par les Francofolies, les Transmusicales, et quelques autres rassemblements festifs où les sourires s’étirent et les âmes se dépaysent.
Un quatuor secret élaborant des morceaux dans une sombre caverne préhisto-grotte, loin des élevages de saumons aux hydrocarbures et aux sulfates paresseux, et les éprouvant sur des scènes de plein air et de spectacle vivant. L’empreinte est leur deuxième album, tout en vapeurs électriques et vibrations acoustiques, bon et bio.
Les cordes savent être plumes au gré des vents et astéroïdes ascensionnels, elles décrivent à la perfection ce que les mots ne savent pas dire dans un rayon de soleil traversant soudainement la surface animée d’une mer, à suspendre les pulsations le temps d’un regard.
Invitation au sacrifice et au renoncement, "Accepte que je reste, ne serait-ce peut-être que quelques jours, même si c’est elle déjà qui brûle en toi, accepte de perdre la tête comme un clebs qu’on laisse au bord de la route" ("Accepte") commence comme un cri de détresse et se termine avec des claviers gonflés à l’hélium. A faire planer tous les marquis de Sade comme des derviches en apesanteur.
Des claviers délicats, à tâtons pour ne pas réveiller les ombres, la voix se brise en une complainte sur le retour, le silence se fait et le souffle se brise. Pas besoin de don de polyglotte pour vivre la douleur de "Spring", en anglais. Les saisons du calendrier sont un prétexte aux métaphores des états intérieurs : "Sous la neige", "Un jour d’été", "Sweet summer bird".
Le débit s’accélère, les basses se font pesantes, le souffle est saccadé, les volutes montent et l’urgence se fait sentir dans d’autres titres comme "Good Boy" ou "Show". Chaque pause est précisément placée pour harmoniser l’ensemble avec une intelligence que ne renierait pas la longévité des trilobites.
L’empreinte, c’est ce qui reste, des traces dans la neige, la boue, les souvenirs, les corps et les âmes. Si nos choix nous construisent, nos empreintes nous définissent depuis le premier souffle jusqu’au dernier coup de batte.
Mélancolique, l’album est un savoureux ensemble de treize titres comme treize moments palpitants, treize instantanés inoubliables, treize fois où le cœur a succombé, treize tremblements essentiels où les émotions ont entrainé des vertiges acoustiques inoubliables, mélange de magie douloureuse et de nitroglycérine parfumée.
Un printemps décidément capricieux mais quelques jours de beau temps avant un nouveau déluge. Ici c'est un déluge de musique, spectacles ou livres qui nous attend.
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