"L’Affaire Flamenco" dont une moitié d'indice est donné par le sous-titre "une tâche sur le tee-shirt", se présente comme un thriller sur fond de politique fiction qui s'avère être une variante contemporaine et hémoglobinée de l'intrigue du roman à clés de secret de polichinelle de François Giroud paru en 1983, "Le bon plaisir".
En effet, ce n'est pas une jeune femme ordinaire, qui est victime d'un crime sans mobile apparent, tuée à bout portant sur le seuil de son domicile alors qu'un petit ami de passage dort dans la chambre.
Car celle-ci est la maîtresse du chef de l'Etat français et de surcroît enceinte de ses oeuvres. Un Président de la République dont le profil a tôt fait de se dessiner, nonobstant l'indication de l'éditeur tenant à ce que "toute ressemblance à la réalité ne doit être que pure coïncidence".
En effet, il est décrit comme un prédateur sexuel qui s'était tenu tranquille depuis son mariage avec "l'une des plus belles femmes de France", intelligente, sexy, manipulatrice et gauchiste qui "quand elle n'était pas au bras de son cher époux, elle travaillait à ses chansons" et "lui en faisait voir de toutes les couleurs" en le harcelant de questions et s'opposant à lui à chaque décision.
De là à envisager l'élimination d'une future paternité compromettante ou la vengeance de l'épouse bafouée...
Cela étant, s'en suivent la cavale du petit ami qui n'est au courant de rien et une enquête policière avortée mais dont le principal protagoniste, un lieutenant d'origine sénégalaise devenu le détenteur involontaire de ce secret défense ("Lorsqu'un Président de la République est amoureux, c'est une affaire d'Etat. Mais lorsqu'il est jeune marié et que cet amour doit rester clandestin, c'est le secret défense"), se retrouve également, devenu gibier, de l'autre côté du fusil.
Etre les dibiteries de la Goutte d'Or, une chaumière du pays vexin transformée en bunker de survie et en centre de commandement stratégique par le ministre de l'intérieur en 2002 qui depuis a accédé à la législature suprême, une mini-cité africaine clandestine installée dans les égouts clichyssois et la banlieue de Dakar, la chasse à l'homme est menée par "une sorte de surdoué de la sécurité, doublé d'un paranoiaque obsédé (sexuel)", un colonel "personnage clé de la sécurité de la République et ami personnel du président en exercice".
Et comme cela ne suffisait pas, ce dernier est manipulé par le directeur du SDECE au parcours pour le moins atypique voire incroyable (enfant sans papier rescapé d'une fusillade sous l'occupation allemande, il parvient à survivre et à rejoindre Londres où il entre dans l'Etat-major du Général de Gaulle qu'il suit en Indochine où il est capturé puis enrôlé par les services secrets chinois avant de resurgir en France où il est "retourné" par les services secrets français).
La particularité de ce thriller sur fond de politique fiction et d'africanophilie publié chez un éditeur américain d’origine sénégalaise, même s'il a été ensuite recadré, est d'avoir été écrit par Richard Joffo au fil de l'eau, ou plutôt en ligne, à la manière des feuilletonistes du 19ème siècle, sur le site d'un réseau social en interaction avec les réactions des internautes.
Cela explique sans doute la mise en page atypique du texte avec un retour à la ligne quasi systématique à la fin de chaque phrase - qui imprime un rythme non naturel à la lecture qui peut s'avérer gênante et/ou laborieuse - et, par ailleurs, la présence de digressions, qui telle la biographie du fameux directeur du SDECE, qui laissant accroire à une intrigue complexe mettant en jeu des puissances internationales, alimentent un faux suspense pour une intrigue dont le dénouement, par voie de conséquence, apparaît décevant.
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