Réalisé par Juliana Rojas et Marco Dutra. Brésil/France. Drame/Fantastique. 2h15 (Sortie le 21 mars 2018). Avec Isabel Zuaa, Marjorie Estiano, Miguel Lobo, Cida Moreira, Andrea Marquee, Felpe Knji, Nina Medeiros et Neusa Velasco.
Habituellement, le cinéma brésilien traite plutôt de sujets familiaux, en cherchant à se démarquer du simplisme des "télénovelas". Parfois, il emprunte des voies plus originales, à l'exemple du très réussi "Gabriel et la montagne" de Gabriel Mascaro.
Mais, question originalité, "Les Bonnes Manières" de Juliana Rojas et Marco Dutra dépasse tout. Et pour cause...Derrière son titre anodin et passe-partout, on découvrira, après quelques minutes trompeuses, un sujet vraiment inattendu. Sans trop en dire, on est alors plongé dans un climat fantastique qui, il faut prévenir les âmes sensibles, n'est pas exempt de scènes gores qui pourront effrayer ceux qui croyaient voir un film brésilien léché, à l'image de ses premières scènes. En effet, on suit Clara, une jeune femme noire issue d'une banlieue pauvre, qui postule pour être nounou d'Ana, une femme blonde de son âge enceinte qui vit seule dans un grand appartement de Sao Paulo. Elle n'a, apparemment, pas le profil exigé, mais elle va obtenir le poste. On suppose alors que le film va tourner autour des relations entre ses deux femmes venant de deux horizons totalement différents... Les choses ne se dérouleront pas totalement de cette manière, même si les deux femmes vont sympathiser, car, pendant sa grossesse, Ana va connaître des crises de somnambulisme et être prise d'une furieuse envie de viande.
Dès lors, il faudra attendre l'heure de "l'accouchement" d'Ana pour saisir pourquoi "Les Bonnes manières" de Juliana Rojas et Marco Dutra va bifurquer définitivement vers autre chose qu'une "paisible" étude de mœurs, pour découvrir pourquoi Clara deviendra le personnage principal de ce conte cruel, de ce conte sanglant dont l'autre pièce maîtresse sera Joel, le fils d'Ana.
Faut-il en dire davantage ? Faut-il ajouter que Joel, avec son visage d'ange tourmenté, rappellera celui de Damien, le héros de "la Malédiction" (1976), film de Richard Donner et que cette pauvre Ana vivra puissance mille ce que vécut Rosemary avec son bébé ?
Dans sa seconde partie, "Les Bonnes Manières" alterne les scènes diurnes dans une grande ville pleine de tentations consuméristes et les scènes nocturnes, moments propices aux cauchemars, aux transformations improbables des enfants imberbes en poilus loups-garous...
Film d'un genre pas très pratiqué chez les Cariocas et autres Brésiliens, "Les Bonnes Manières" de Juliana Rojas et Marco Dutra est avant tout une grande histoire d'amour excellemment filmée dont la résolution mélodramatique tirera des larmes aux plus insensibles spectateurs et restera longtemps dans le cœur des autres. |