"C’est l’inconnu, le mystère, la séduction fatale, la fleur vénéneuse, et donc une musique sensuelle et lascive, aux mélismes envoûtants, aux harmonies troublantes". Gérard Condé
L'emploi des musiques traditionnelles comme source d’inspiration dans la musique parait être une constante dans la musique savante occidentale.
De Shéhérazade de Ravel à Thaïs ou Cléopâtre de Massenet, l’Orient offre aux compositeurs français du début du XXème siècle un terrain idéal pour combler les désirs d’exotisme de l’époque, à la mode notamment grâce à la dernière période coloniale et aux multiples expositions universelles organisées en Europe.
Est-ce qu’en composant Shéhérazade, Tzigane ou sa Rapsodie Espagnole, Ravel avait un intérêt exotique au sens romantique, c’est-à-dire un intérêt à stimuler l’imagination par des traits stylistiques normalisés renvoyant à un ailleurs plus ou moins imaginaire ou fantasmé ? On peut penser que l’exotisme pour le compositeur Français était assez loin du simple pastiche, qu’il était une façon de s’échapper du monde, et de l’académisme, qui l’entourait pour mieux plonger dans des esthétiques nouvelles et de créer son propre univers.
C’est à une plongée dans cet univers que nous propose l’ensemble d’une grande virtuosité Musica Nigella avec des arrangements d’une grande pertinence de Takénori Némoto. Le passage du grand orchestre à une formation musique de chambre est fait avec beaucoup de savoir-faire et de souplesse.
Ce Ravel l’exotique est un disque incandescent, l’expression d’une belle sensibilité artistique avec un soin apporter aux couleurs, aux expressions (de la soprano Marie Lenormand dans Shéhérazade par exemple, dans une version de Tzigane plus brute) et une interprétation pleine d’élégance et de subtilité.
Un beau disque qui termine en apothéose avec une éclatante version de la Rapsodie Espagnole. |