Réalisé
par Delphine Gleize. France. Drame.
Durée : 1h50.
(Sortie 2 mars2011) Avec Vincent Lindon, Emmanuelle Devos, Quentin Challal, Caroline Proust, Nathalie Boutefeu et Laurent Capelluto.
Pour apprécier à sa juste valeur ce film émouvant, il faudra à bien des spectateurs potentiels ou virtuels du courage pour avoir envie de devenir des spectateurs réels.
Car deux écueils majeurs pourraient paraître rédhibitoires aux plus bienveillants : le sujet et l’acteur principal.
Depuis quelque temps, que l’on peut dater au succès de la trithérapie pour ceux qui en souffrent, le sida n’est plus le thème compassionnel majeur. Du coup,c’est le cancer qui a pris le relais sur les écrans, comme l’ont prouvé récemment "Biutiful" d’Alejandro Gonzales Uxbal avec Javier Bardem, d’Anne Le Ny, "Ceux qui restent" d’Anne Le Ny ou "Le bruit des glaçons" de Bertrand Blier.
Mais si le sida pouvait à tort ou à raison être une maladie pour des populations bien identifiées ou parfois stigmatisées, le cancer touche tout le monde. Traiter du sujet, c’est provoquer chez le spectateur une évidente identification et une exigence, celle de ne pas être voyeur de ce qui peut lui advenir.
En lisant le résumé du scénario de "La permission de minuit", on peut légitimement émettre une crainte : pourra-t-on supporter d’être témoin de la vie en pointillé d’un "enfant-lune", obligé la plupart du temps de se cacher d’une lumière qui le tue peu à peu dans une tenue de "cosmonaute" ? Ne sera-t-on pas démuni comme son médecin qui souffre intensément de ne pouvoir le soigner ?
Surtout, et c’est là la seconde crainte majeur, si le chirurgien est joué par un jeune quinquagénaire désormais préposé à toutes les causes nobles et désespérées : Vincent Lindon.
Après avoir sauvé sa petite entreprise, appris à nager à un sans-papier, le voilà auprès d’un adolescent cancéreux et attachant.
Portant entièrement le film sur ses épaules avec son jeu rentré et tout dans ce regard profond qu’on connaît par cœur, Lindon contentera forcément ses admirateurs. Mais il faut assurer à ceux qui ne le sont pas qu’il mouille tellement sa chemise chirurgicale, qu’il prend tellement sur lui le fardeau de l’enfant malade qu’il retournera les plus cruels de ses contempteurs qui ironisent toujours sur sa nervosité faciale.
Le couple qu’il forme avec le jeune Quentin Challal est un vrai moment de vérité cinématographique et l’on peut féliciter la réalisatrice, Delphine Gleize, d’avoir réussi cet amalgame miraculeux entre un acteur au-delà du chevronné et un novice dont c’est la première apparition à l’écran.
Grâce à ces deux acteurs, on ne regrettera pas les larmes que l’on va verser à coup sûr et Delphine Gleize réussira à enlever des têtes les plus dures l’idée de tout voyeurisme.
Comme on dit, donc : "La permission de minuit" est un beau film, nécessaire, qui laissera des traces chez tous les spectateurs de bonne volonté, ceux qui auront le petit courage d’aller voir le grand courage de ces enfants malades. |