Si pour certain le nom de Nicole Wray (autrefois stylisé Ray) provoquera au mieux la levée de quelques sourcils interrogateurs, pour d’autres elle reste l’une des chanteuses américaines les plus marquantes apparue à la fin des années 90. Elle fut découverte sous l’aile de Missy Elliott pour qui elle chanta sur les albums Supa Dupa Fly et Da Real World avant de sortir l’album Make It Hot, qui fut porté par le single du même nom (il fut d’ailleurs repris cette année lors d’un showcase par Oliver Smith de The XX et par Solange). Son second album ne verra jamais le jour, mais on la retrouve dans plusieurs projets à pousser de la voix pour des artistes variées comme les Black keys (sur l’album Brothers et en tant qu’artiste à part entière du projet Blackroc), Kid Cudi, Dirt McGirt et encore bien d’autres.
Et c’est grâce à son carnet d’adresse bien fourni qu’elle finit par rencontrer Jeff Silvermans et Leon Michels de Truth & Soul Records. Les deux producteurs lui demandent alors d’écrire pour l’album de Lee Fields, Faithful Man.
Au sein de l’écurie Truth & Soul, elle entre en contact avec Terri Walker, une chanteuse anglaise qui sortit un album de neo-soul en 2003 (elle remporta un prix Mercury avec celui-ci) et accompagne Lee Fields & The Expression en tournée (avec une date française à Nancy en 2012 pour le festival Jazz Pulsations).
De cette aventure, et surtout avec une maison de disque comme entre metteuse va naître Lady. Et c’est durant la tournée de promotion de Faithful Man que le duo nouvellement formé va prendre son envol. Lors des concerts, elles entonnent les titres "Hold On" et "Get Ready", deux chansons entrainantes à mi-chemin entre un R’n’B old school et une musique soul inspirée par les jazzmen de leurs maison de disque.
Dès lors, et après une réception plus que positive du public, les deux chanteuses décident de parfaire leur répertoire et d’enregistrer un album entier. Celui-ci, qui répond au titre éponyme de Lady, relève un défi qui commence à se généraliser en 2013 : faire du neuf avec du vieux.
Autrement dit, si Lady est un groupe (et un album, si vous avez bien suivi !) résolument moderne, ses bases sont fièrement enchâssées dans la culture de la musique jazz et soul et tout comme l’album The 20/20 Experience de Timberlake pousse l’exploration sonore du côté de nos ainés.
De fait, Terri et Nicole ont largement profité de l’apport de Lee Fields qui les a aidés à offrir un esprit un peu plus "MoTown" à leur album.
Pour exemple, le titre "Good Lovin’" alterne entre un rift assez féroce et efficace qui se double rapidement d’une ligne de basse aux sonorités modernes, alors qu’enfin l’aspect rétro se découvre à renfort de cuivres.
Une construction quelque peu complexe, mais qui somme toute, finit surtout par se reposer principalement sur les voix des chanteuses. Mélancoliques, comme sur le titre "Karma", elles habillent la chanson bien plus dynamiquement sur "Money". Titre des plus efficaces où la touche de Lee Fields est nettement palpable et tout comme leur mentor, les belles savent explorer grâce à leurs cordes vocales tout un registre d’émotions, compris entre le jazz et la soul.
Simplicité et efficacité sont les impressions que l’on se fait à la première écoute de cet album, quand une seconde, plus approfondie, nous fera découvrir un égrenage d’arrangement et de notes parcimonieusement placé, offrant un effet élaboré classieux et hautement additif.
L’album dévoilera un aspect faussement "old school" qui s’offre en prime, à la façon d’une chanson pop, (la touche MoTown encore) le luxe de se parer de refrain entêtant (les paroles de "Money", "Get Ready" ou encore "Sweet Lady" s’incrustent dans la cervelle très vite). Et comme souvent avec ce genre de chansons, on cède facilement à l’impression d’avoir déjà entendu tout cela, sans pour autant s’empêcher de secouer la tête en rythme avec un petit air de connivence.
Finement produit, Lady demandera sûrement plusieurs écoutes pour l’apprécier à sa juste valeur. Néanmoins, il restera un album accessible aux masses grâce à sa légèreté soul parfois pop, sans pour autant perdre en crédibilité auprès des véritables afficionados du genre. |